Le Conseil d’État, dans sa décision du 16 juin 2025, se prononce sur la légalité d’un refus opposé à un projet de reconversion dans le secteur privé. Une agente contractuelle d’une commission nationale de régulation souhaitait rejoindre une entreprise dont elle avait contrôlé l’activité durant ses fonctions publiques précédentes. La haute autorité compétente a émis un avis d’incompatibilité, fondant sa position sur le risque pénal de prise illégale d’intérêts. La requérante invoquait l’irrégularité formelle de cette décision ainsi qu’une erreur d’appréciation manifeste commise par l’administration dans l’examen de son dossier. La juridiction administrative rejette la requête, validant ainsi une lecture stricte des impératifs de déontologie s’imposant aux anciens serviteurs de l’État. L’étude de cet arrêt invite à analyser la régularité formelle des actes administratifs avant d’apprécier la portée de la surveillance déontologique.
I. La présomption de régularité procédurale des délibérations collégiales
A. Le rejet d’un formalisme excessif dans la rédaction de l’acte
L’agente soutenait que la délibération n’apportait pas la preuve de la convocation régulière et du respect du quorum des membres délibérants. Le Conseil d’État précise qu’aucune disposition n’impose qu’un acte administratif « fasse par elle-même la preuve de sa régularité » au regard de ces règles. La haute juridiction refuse ainsi d’ajouter des exigences de motivation formelle non prévues par les textes régissant le fonctionnement de l’autorité. Cette approche pragmatique évite la multiplication de mentions purement formelles dont l’absence ne saurait suffire à entacher la légalité d’une décision.
B. La validation a posteriori du fonctionnement de l’organe délibérant
La légalité externe de la décision est confirmée par les pièces produites durant l’instruction, attestant de la présence de la quasi-totalité des membres. Les éléments du dossier démontrent que douze membres sur treize étaient présents et que l’adoption s’est faite à la majorité requise. Cette solution garantit la sécurité juridique des actes administratifs tout en permettant un contrôle effectif de la régularité par le juge du fond. L’administration a ainsi pu établir le respect des garanties procédurales malgré l’absence de mentions explicites dans le corps de l’avis litigieux.
II. La prévention accrue du risque de prise illégale d’intérêts
A. La mission d’évaluation d’un risque pénal potentiel
La haute autorité examine si l’activité privée « risque de placer l’intéressé en situation de commettre » les infractions prévues par le code pénal. Le juge souligne qu’il n’appartient pas à l’administration de vérifier si les éléments constitutifs du délit sont d’ores et déjà réunis. L’appréciation porte sur l’éventualité d’une mise en cause ultérieure afin de protéger tant l’agent public que l’image de l’administration employeuse. Ce contrôle anticipé constitue une mesure de sauvegarde nécessaire pour maintenir la confiance des citoyens dans l’impartialité des autorités publiques.
B. La sévérité de l’appréciation des fonctions de contrôle passées
La requérante faisait valoir la brièveté de son intervention dans le contrôle et son absence d’influence réelle sur les décisions finales. Le Conseil d’État écarte cet argument en retenant que la signature d’un procès-verbal suffit à caractériser l’exercice effectif d’une mission de surveillance. Le lien capitalistique entre la société contrôlée et le futur employeur justifie l’interdiction, même si les faits de contrôle étaient limités dans le temps. La rigueur de cette solution témoigne de la volonté du juge administratif d’assurer une étanchéité absolue entre les fonctions publiques et les intérêts privés.