10ème chambre du Conseil d’État, le 20 mai 2025, n°498654

Le Conseil d’État a rendu une décision importante le 20 mai 2025 concernant l’accès aux documents administratifs relatifs au permis de conduire. Un conducteur avait sollicité la communication d’une copie de la décision constatant la perte de validité de son titre pour solde de points nul. Après un avis favorable de la commission d’accès aux documents administratifs, l’intéressé a saisi le juge des référés pour obtenir la suspension du refus. Le tribunal administratif de Paris a d’abord fait droit à cette demande le 14 octobre 2024 en enjoignant à l’administration de délivrer le document. L’administration s’est alors pourvue en cassation devant la haute juridiction administrative pour obtenir l’annulation de cette ordonnance rendue en premier ressort. Les juges du fond considéraient que les contraintes techniques invoquées par l’État constituaient de simples considérations d’organisation interne insuffisantes pour justifier le refus. L’autorité administrative soutenait au contraire que le traitement automatisé des données rendait matériellement impossible toute réédition du document original de notification individuelle. L’étude de cette décision s’articulera autour de la reconnaissance d’une impossibilité technique de communication (I) avant d’analyser la préservation des droits par des voies alternatives (II).

**I. L’admission de l’impossibilité matérielle de communication du document**

**A. La remise en cause de l’appréciation des premiers juges**

Le juge des référés avait initialement écarté les arguments de la défense en les qualifiant de simples considérations d’organisation interne peu probantes. Le Conseil d’État estime au contraire que le tribunal a commis une erreur de droit en refusant de prendre en compte ces explications. L’administration invoquait des raisons techniques précises tenant au traitement automatisé dénommé « Système national des permis de conduire » empêchant toute réédition à l’identique. Cette impossibilité matérielle de produire une copie d’un document qui n’est pas conservé constitue un motif légitime pour s’opposer à la demande de communication.

**B. Les contours de l’obligation pesant sur les autorités administratives**

Le droit d’accès garanti par le code des relations entre le public et l’administration suppose nécessairement que le document existe encore au moment de la demande. « Les administrations sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande » selon les termes clairs du code. L’absence de conservation d’une copie de la lettre recommandée envoyée par l’Imprimerie nationale fait donc obstacle à la mise en œuvre de cette obligation légale. La décision commentée rappelle que le juge administratif doit vérifier la réalité des contraintes techniques opposées par les services publics face aux administrés. L’admission de cette impossibilité technique de communication conduit toutefois le juge à rechercher si d’autres moyens garantissent l’effectivité des droits de l’administré.

**II. La préservation des droits du conducteur par des voies alternatives**

**A. La valeur probante du relevé d’information intégral**

La solution retenue s’appuie sur l’existence d’un autre document administratif accessible au conducteur et contenant les mêmes mentions juridiques que la décision perdue. Les informations essentielles figurent de manière exacte sur le relevé d’information intégral que chaque titulaire peut obtenir auprès des services préfectoraux compétents. Le Conseil d’État souligne que ce document permet à l’intéressé de se prévaloir de ses droits pour s’inscrire à un nouvel examen du permis. Cette substitution d’acte évite ainsi de porter une atteinte disproportionnée aux libertés individuelles malgré l’impossibilité de fournir l’original de la notification.

**B. Une portée limitative du droit à la communication individuelle**

Cette jurisprudence marque une limite notable à l’effectivité du droit d’accès lorsque le support original a disparu suite à un processus de gestion automatisée. Les requérants doivent désormais se tourner vers les documents de synthèse disponibles plutôt que d’exiger la reproduction formelle d’un acte de notification individuelle épuisé. La décision assure un équilibre entre les exigences de transparence administrative et les réalités opérationnelles des grands systèmes de traitement de données nominatives. Elle confirme enfin la rigueur du contrôle exercé en cassation sur l’appréciation souveraine des faits opérée par les juges de première instance.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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