Le Conseil d’Etat a rendu le 10 juillet 2025 une décision rejetant le recours contre un décret d’opposition à l’acquisition de la nationalité française. Un ressortissant étranger a souscrit une déclaration de nationalité par mariage en juin 2021 avant que le Premier ministre ne s’y oppose par décret. Le gouvernement a invoqué l’indignité du déclarant en raison de condamnations pénales pour travail dissimulé et de multiples infractions répétées au code de la route.
Le requérant conteste la régularité de la procédure de notification ainsi que la qualification d’indignité retenue par l’autorité administrative pour rejeter sa demande. Il appartient aux juges de déterminer si la commission d’infractions pénales récentes permet légalement de faire échec à l’acquisition de la citoyenneté française par mariage. La Haute Assemblée juge que la gravité des faits reprochés permet au gouvernement de s’opposer valablement à cette acquisition par le décret du 30 mai 2024.
I. La régularité de la procédure d’opposition gouvernementale
A. Le respect des exigences formelles et contradictoires
Le requérant soutient que l’absence de signatures ministérielles sur l’ampliation du décret notifié constitue un vice de forme entachant la légalité de la décision attaquée. Le Conseil d’Etat écarte ce moyen en précisant qu’aucune disposition n’impose que les signatures originales soient apposées sur l’acte transmis à l’intéressé par l’administration.
L’administration a également respecté le principe du contradictoire en notifiant les motifs de fait et de droit dès le 15 décembre 2023 au déclarant étranger. Le requérant a pu produire des observations en défense reçues par le ministre de l’intérieur en janvier 2024, conformément aux dispositions réglementaires du décret de 1993.
B. La conformité du décret à l’avis obligatoire du Conseil d’Etat
L’article 21-4 du code civil prévoit que le gouvernement s’oppose à l’acquisition de la nationalité par un décret pris après avis conforme du Conseil d’Etat. Il ressort des pièces du dossier que l’acte attaqué a été adopté suivant l’avis émis par la Haute Juridiction administrative sur le projet de décret initial.
La procédure consultative ayant été régulièrement suivie, le gouvernement a pu légalement exercer son pouvoir d’opposition dans le délai de deux ans imparti par la loi. Le respect de ces garanties procédurales permet désormais au juge administratif d’examiner le bien-fondé de la qualification d’indignité retenue à l’encontre du demandeur.
II. Le contrôle de la qualification juridique d’indignité
A. La portée des infractions pénales répétées sur l’indignité
Le gouvernement fonde son opposition sur des faits d’emploi d’étrangers sans autorisation et de travail dissimulé commis par l’intéressé en sa qualité de gérant. Le requérant s’est également rendu coupable de multiples infractions routières répétées jusqu’en 2022, alors que son permis de conduire faisait l’objet d’une invalidité administrative.
La juridiction administrative estime que ces agissements, par leur caractère récent et leur gravité, « rendaient l’intéressé indigne d’acquérir la nationalité française » au sens du code civil. L’indignité résulte ici d’une méconnaissance persistante des lois de la République qui s’oppose frontalement aux devoirs inhérents à la qualité de citoyen français.
B. L’indifférence de l’insertion professionnelle face au comportement délictueux
Le requérant tente de justifier sa demande en mettant en avant sa bonne intégration sociale ainsi que son insertion professionnelle réussie sur le territoire national. Le Conseil d’Etat juge que le déclarant « ne saurait utilement se prévaloir de sa bonne intégration » pour contester la mesure d’opposition prise par le Premier ministre.
L’appréciation de l’indignité constitue un examen global du comportement du candidat qui ne peut être compensé par la seule réussite de son parcours professionnel. La requête tendant à l’annulation du décret du 30 mai 2024 est donc rejetée, confirmant la rigueur du contrôle exercé sur l’accès à la nationalité française.