3ème chambre du Conseil d’État, le 30 avril 2025, n°488147

Par une décision rendue le 30 avril 2025, le Conseil d’État s’est prononcé sur la légalité d’une instruction technique ministérielle relative au certificat d’engagement pour les équidés. Une association de protection animale contestait ce document au motif qu’il excluait certains acteurs de l’économie circulaire de la délivrance dudit certificat de connaissance. Les faits trouvent leur origine dans la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et à conforter le lien entre les hommes. Ce texte impose aux détenteurs non professionnels d’attester de leurs connaissances spécifiques par la signature d’un document officiel. Un décret du 18 juillet 2022 et deux arrêtés du 29 décembre 2022 sont venus préciser les modalités d’application de cette obligation législative. Le ministre de l’agriculture a ensuite publié une instruction technique le 26 avril 2023 pour détailler le contenu et l’utilisation de ce certificat. L’association requérante a saisi directement le Conseil d’État d’un recours pour excès de pouvoir afin d’obtenir l’annulation de cette instruction ministérielle. Elle invoquait notamment une discrimination injustifiée et une méconnaissance de la Charte de l’environnement dans le choix des organismes habilités. La question posée au juge consistait à savoir si une instruction ministérielle peut être annulée lorsqu’elle se borne à réitérer des dispositions réglementaires non contestées. Le Conseil d’État rejette la requête en considérant que l’acte attaqué n’ajoute aucune règle nouvelle à l’ordonnancement juridique en vigueur. L’analyse portera d’abord sur la caractérisation de l’acte attaqué au regard du droit souple, avant d’examiner le bien-fondé du rejet fondé sur la légalité réglementaire.

I. La réception contentieuse d’une instruction ministérielle de portée générale

A. L’application des critères de recevabilité du droit souple

Le Conseil d’État rappelle que les documents émanant d’autorités publiques peuvent être déférés au juge lorsqu’ils produisent des « effets notables » sur la situation des administrés. Cette solution s’inscrit dans la lignée de la jurisprudence de 2020 qui a unifié le régime de contestation des actes administratifs de droit souple. L’instruction litigieuse est considérée comme un acte de portée générale car elle présente un « caractère impératif » ou fixe des lignes directrices pour les agents. Le juge administratif accepte d’examiner la requête car le document influence directement les modalités de détention des chevaux par des personnes physiques. Cette ouverture du recours garantit un contrôle effectif de la légalité des circulaires administratives qui complètent souvent les textes législatifs ou réglementaires.

B. La reconnaissance d’un acte administratif à caractère impératif

La recevabilité étant admise, le Conseil d’État examine la portée juridique réelle des précisions apportées par le ministre chargé de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. L’instruction doit modifier l’ordonnancement juridique ou porter une atteinte directe aux droits des tiers pour justifier une éventuelle annulation par le juge. Le juge vérifie si l’administration n’a pas excédé sa compétence en édictant des règles nouvelles sans une base légale ou réglementaire suffisante. Cette étape constitue un préalable indispensable pour déterminer si les griefs soulevés par l’association requérante peuvent utilement être dirigés contre ce texte technique. Le raisonnement conduit alors la haute juridiction à confronter le contenu de l’instruction aux normes de rang supérieur déjà existantes.

II. La validation du contenu de l’instruction par la confirmation du cadre réglementaire

A. Le rejet des moyens d’annulation insuffisamment étayés

Plusieurs moyens invoqués par la partie requérante sont écartés d’emblée car ils ne sont « assortis d’aucune précision permettant d’en apprécier le bien-fondé » par le juge. Le Conseil d’État refuse d’analyser des critiques trop vagues concernant la méconnaissance de la hiérarchie des normes ou l’absence de décret en Conseil d’État. Cette exigence de précision impose aux requérants de structurer leurs arguments juridiques afin de permettre un contrôle administratif sérieux et efficace. La simple affirmation de l’illégalité d’une instruction ne suffit pas à renverser la présomption de légalité dont bénéficient les actes de l’État. Cette rigueur procédurale protège l’administration contre des recours mal étayés qui ralentiraient inutilement l’application des politiques publiques de protection contre la maltraitance.

B. L’absence d’illégalité propre de l’acte réitérant des normes en vigueur

L’association dénonçait une discrimination car elle ne figurait pas parmi les organismes habilités par le ministre à délivrer le précieux certificat d’engagement. Le Conseil d’État rejette ce grief en soulignant que l’instruction contestée « se borne sur ce point à rappeler les dispositions » du code rural. Le ministre n’a fait que réitérer une liste fixée par un arrêté antérieur de 2022 que l’association n’avait pas attaqué. La légalité de l’acte de droit souple est ainsi protégée par le caractère définitif des dispositions réglementaires qu’il se contente de commenter. Le juge confirme que la contestation d’une circulaire ne permet pas de remettre indirectement en cause des règlements devenus inattaquables.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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