Par une décision du 27 juin 2025, le Conseil d’État précise les modalités de contestation des refus d’accès aux zones à régime restrictif. Un chercheur étranger s’est vu refuser l’autorisation d’accéder à un laboratoire de recherche en raison d’un avis ministériel défavorable à son recrutement. Le candidat a sollicité la suspension de ce refus devant le juge des référés du tribunal administratif de Versailles sur le fondement de l’urgence. Le magistrat a rejeté cette demande par une ordonnance du 16 décembre 2024 en considérant que la requête était manifestement dépourvue de fondement sérieux. Le requérant a donc formé un pourvoi en cassation afin de contester la régularité formelle de l’ordonnance et l’appréciation des éléments de preuve. La Haute Juridiction doit déterminer si l’absence d’éléments étayés permettant de contester un risque sécuritaire autorise le juge à rejeter immédiatement la demande de suspension. L’examen du litige commande d’étudier d’abord le cadre du contrôle juridictionnel de ces refus avant d’apprécier la mise en œuvre de la procédure de référé.
I. L’encadrement du contrôle juridictionnel des refus d’accès aux zones protégées
A. La persistance d’un contrôle de légalité malgré l’absence d’obligation de motivation
L’article R. 413-5-1 du code pénal dispose que le refus d’autorisation d’accès aux zones à régime restrictif n’a pas besoin d’être motivé par l’administration. La jurisprudence administrative rappelle toutefois qu’il appartient au juge de l’excès de pouvoir de « contrôler […] la légalité des motifs sur lesquels ce refus est fondé ». Le magistrat doit s’assurer que la décision n’est pas entachée d’erreur de droit, d’erreur manifeste d’appréciation ou même d’un éventuel détournement de pouvoir caractérisé.
B. L’usage des pouvoirs d’instruction face au secret de la défense nationale
Afin d’exercer ce contrôle sans nuire à la protection des intérêts fondamentaux, le juge dispose de ses pouvoirs généraux de direction de l’instruction juridictionnelle. Il lui est loisible de « prendre […] toutes mesures propres à lui procurer […] les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction » en l’espèce. Cette faculté permet de concilier l’exigence d’un recours effectif pour les agents avec les nécessités impérieuses du secret protégé par la loi française. La rigueur de ce cadre juridique influence directement les conditions dans lesquelles le juge des référés peut statuer sur une demande de suspension.
II. La validation de la procédure de référé pour défaut de contestation étayée
A. L’absence d’incidence d’une erreur de plume sur la régularité de la décision
Le Conseil d’État rejette d’abord le moyen tiré d’une erreur de droit résultant de la citation erronée des textes applicables à la procédure de référé. Une simple erreur de plume du premier juge n’entache pas d’irrégularité l’ordonnance si le sens global de la motivation demeure parfaitement clair pour les parties. La décision précise que la citation maladroite des dispositions régissant la recevabilité « n’entache pas d’erreur de droit l’ordonnance attaquée » dès lors que le fond est traité.
B. La nécessité d’apporter des éléments factuels précis pour créer un doute sérieux
Pour obtenir la suspension, le requérant doit faire état d’un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision administrative contestée. Or, l’intéressé s’est ici « borné à exposer son parcours académique et professionnel sans apporter d’élément étayé » susceptible de contredire l’analyse des risques sécuritaires de l’autorité. Le Conseil d’État valide ainsi le rejet immédiat de la demande car le candidat n’a pas apporté de précisions factuelles sur les griefs reprochés par l’administration.