4ème – 1ère chambres réunies du Conseil d’État, le 4 avril 2025, n°490026

Le Conseil d’État a rendu, le 4 avril 2025, une décision précisant les conditions de régularisation des requêtes devant les juridictions disciplinaires de l’ordre des médecins. Un praticien a été sanctionné par une interdiction d’exercer la médecine pour une durée d’un mois assortie du sursis par une chambre de première instance. Le président de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a rejeté l’appel formé par ce professionnel par une ordonnance d’irrecevabilité manifeste. Le requérant a alors saisi le Conseil d’État pour obtenir l’annulation de cette décision rendue le 10 octobre 2023 en raison d’un vice de procédure. Le litige porte sur l’obligation de notifier les demandes de régularisation à l’adresse précisément indiquée par l’auteur d’un recours devant le juge administratif. La Haute juridiction annule l’ordonnance attaquée en jugeant que la notification irrégulière vicie l’ensemble de la procédure de rejet pour défaut de copies. L’étude de cette solution permet d’apprécier la définition des parties à l’instance disciplinaire puis les garanties procédurales entourant la notification des actes.

I. La reconnaissance de la qualité de partie au conseil départemental de l’ordre

A. L’inclusion du conseil départemental dans le champ des parties à l’instance

Le juge administratif rappelle que le conseil départemental de l’ordre doit recevoir communication des mémoires et des pièces produites durant toute l’instance disciplinaire. Cette obligation découle des dispositions du code de la santé publique qui organisent la représentation et la surveillance des professions médicales sur le territoire national. Bien qu’il ne s’associe pas toujours à la plainte initiale, cet organe « doit être regardé comme une partie » au sens des règles procédurales. Sa présence garantit le respect du contradictoire en permettant à l’ordre de suivre l’évolution des débats judiciaires concernant l’un de ses membres.

B. L’exigence du nombre de copies comme mesure de bonne administration

Le dépôt de copies supplémentaires « répond à des considérations de bonne administration de la justice » en facilitant la transmission des écritures aux différents intervenants. Cette règle permet au greffe d’assurer la communication rapide des arguments de l’appelant sans supporter une charge matérielle excessive lors de la mise en état. La sanction de l’irrecevabilité manifeste pour absence de copies demeure toutefois conditionnée par une invitation préalable à régulariser la situation du dossier litigieux. Le juge administratif préserve ainsi l’équilibre entre les exigences de célérité administrative et le droit fondamental des justiciables à accéder au prétoire.

La détermination du nombre de copies nécessaires dépend de la qualité des parties, mais la validité de la procédure suppose une notification régulière de l’invitation.

II. La rigueur du formalisme lié à la notification de la demande de régularisation

A. L’irrégularité de l’envoi postal effectué à une adresse non désignée

Le greffier doit envoyer les demandes de régularisation au moyen de lettres remises contre signature ou par tout dispositif permettant d’attester la réception effective. En l’espèce, le courrier n’avait pas été expédié à l’adresse mentionnée comme étant celle où devait être adressée toute correspondance concernant le recours engagé. Le Conseil d’État considère que la notification n’est pas régulière dès lors que l’administration ignore les indications explicites fournies par le requérant lui-même. Une telle erreur de destination prive le professionnel de la possibilité réelle de corriger le vice de forme affectant initialement sa propre requête d’appel.

B. La protection du droit au recours par l’annulation du rejet d’appel

L’ordonnance ayant rejeté l’appel comme manifestement irrecevable se trouve « entachée d’irrégularité et doit être annulée » en raison du défaut de notification régulière préalable. La Haute juridiction refuse de valider un rejet automatique quand l’impossibilité de régulariser provient d’une faute imputable aux seuls services du greffe. Cette solution réaffirme la primauté du droit au recours effectif sur les contraintes formelles lorsque celles-ci sont appliquées avec une négligence manifeste. L’affaire est renvoyée devant la chambre disciplinaire nationale afin que le litige puisse enfin faire l’objet d’un examen complet sur le fond.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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