Le Conseil d’État, par une décision rendue le 21 mai 2025, précise les conditions de promotion des magistrats administratifs et l’impartialité de leur instance de gestion. Un magistrat exerçant les fonctions de premier conseiller a sollicité l’annulation pour excès de pouvoir d’un décret portant nomination au grade de président. Le requérant estimait que son éviction du tableau d’avancement résultait d’une procédure irrégulière et d’une méconnaissance du principe fondamental d’impartialité. Le litige soulevait la question de la légalité des critères de sélection ainsi que de la composition du Conseil supérieur des tribunaux administratifs. La haute juridiction rejette la requête en considérant que l’organisation statutaire actuelle offre des garanties suffisantes pour assurer l’indépendance des membres du corps. L’étude de cette solution conduit à analyser la régularité de la procédure d’avancement avant d’envisager la validité de l’organisation institutionnelle choisie.
I. L’encadrement de la procédure d’avancement au grade de président
A. La licéité des modalités d’examen des candidatures Le requérant déplorait le refus opposé à ses demandes d’entretien individuel avec les autorités chargées de la gestion des carrières des magistrats. Le Conseil d’État écarte ce grief en soulignant qu’ « aucune disposition législative ou réglementaire n’imposait à ces autorités de recevoir les magistrats promouvables en entretien individuel ». L’examen des candidatures repose sur l’étude des dossiers individuels comprenant les évaluations et les avis motivés des différents chefs de juridiction. Les membres de l’instance de gestion disposent ainsi d’éléments d’appréciation circonstanciés pour se prononcer sur les compétences professionnelles de chaque candidat. Cette procédure garantit un examen individuel effectif sans qu’une audition directe des intéressés ne soit juridiquement requise avant l’établissement du tableau.
B. La pertinence des critères de promotion retenus La sélection des magistrats doit s’opérer en tenant compte des compétences, des aptitudes et des mérites tels qu’ils résultent des dossiers. L’instance de gestion peut légalement intégrer des éléments tels que l’ancienneté, la diversité des expériences professionnelles ou encore l’aptitude à la rédaction. La décision confirme que ces critères ne méconnaissent pas les dispositions du code de justice administrative relatives à l’avancement au choix. L’administration dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour classer les candidats par ordre de mérite selon les nécessités du service juridictionnel. L’absence d’inscription au tableau d’avancement fait ainsi obstacle à toute nomination ultérieure par décret du Président de la République.
II. La consécration de l’impartialité institutionnelle du Conseil supérieur
A. La conformité de la composition de l’organe de gestion L’organisation du Conseil supérieur prévoit la présence de membres de la haute juridiction administrative disposant de prérogatives sur la gestion des carrières. Le juge affirme que cette composition « concourt à garantir l’indépendance et l’impartialité de la juridiction administrative » au sens des dispositions législatives. La participation du vice-président ou du secrétaire général du Conseil d’État ne saurait constituer, en soi, une cause de partialité structurelle. Ces fonctions administratives n’interdisent pas aux intéressés de participer à l’élaboration loyale des tableaux d’avancement des magistrats des tribunaux subordonnés. Le cumul de missions de gestion et de présidence de l’instance délibérante respecte donc les exigences constitutionnelles et conventionnelles d’impartialité.
B. L’effectivité des garanties statutaires d’indépendance Les magistrats administratifs bénéficient d’un statut protecteur qui assure leur autonomie vis-à-vis des autorités supérieures malgré les liens hiérarchiques fonctionnels. Le Conseil d’État rappelle que les garanties reconnues par le code de justice administrative « assurent leur indépendance » à l’égard de sa propre présidence. La nomination et la progression de carrière sont encadrées par des règles objectives qui limitent les risques d’arbitraire ou d’influence indue. Cette indépendance statutaire neutralise les griefs tirés d’un éventuel manque d’objectivité lors de l’examen des mérites des premiers conseillers. En l’absence d’erreur manifeste d’appréciation démontrée, la décision de ne pas promouvoir le requérant demeure parfaitement légale et justifiée.