Par une décision du 24 juillet 2025, le Conseil d’État précise la légalité d’un décret encadrant l’utilisation du compte personnel de formation. Plusieurs organisations syndicales contestaient les restrictions apportées au financement de la préparation aux épreuves du permis de conduire des véhicules terrestres à moteur. La loi du 21 juin 2023 avait pourtant élargi ce dispositif à l’ensemble des catégories de permis de conduire pour favoriser la mobilité. Un décret du 17 mai 2024 a subordonné ce financement à l’absence de détention d’un titre de conduite en cours de validité. Saisis de recours en excès de pouvoir, les juges administratifs devaient examiner la régularité formelle et le fond de cette mesure. Ils devaient déterminer si le pouvoir réglementaire pouvait légalement restreindre l’accès à ce droit selon la situation individuelle du titulaire du compte. La haute juridiction rejette les requêtes en estimant que le décret respecte les objectifs législatifs de mobilité et de retour à l’emploi. L’analyse portera d’abord sur la régularité procédurale de l’acte avant d’examiner la validité de la condition de non-détention d’un permis de conduire.
I. La régularité procédurale de l’adoption du décret
A. La validité des consultations des partenaires sociaux Les requérants soutenaient que le texte avait été adopté au terme d’une procédure irrégulière faute d’une consultation suffisante des organisations représentatives. Le Conseil d’État relève toutefois que le projet a été soumis aux organisations professionnelles ainsi qu’à la commission nationale compétente. Ces consultations répondent aux exigences de la loi du 21 juin 2023 relative à l’obtention de l’examen du permis de conduire. L’autorité administrative a ainsi permis aux acteurs sociaux de faire valoir leurs observations sur les modalités de mise en œuvre du nouveau dispositif. Cette régularité formelle se double d’un respect rigoureux des prérogatives dévolues aux différents départements ministériels concernés par la mesure.
B. L’intervention régulière des autorités ministérielles Le moyen tiré du défaut d’intervention du ministre compétent est écarté après un examen précis de la chronologie des pièces du dossier. Les juges considèrent que ce dernier a été mis en mesure de se prononcer avant la consultation de la commission de surveillance compétente. Les dispositions du code monétaire et financier n’ont donc pas été méconnues lors de l’élaboration de la norme réglementaire contestée. Une fois la légalité externe ainsi confirmée, il convient d’analyser la conformité du décret aux dispositions législatives de fond qu’il devait appliquer.
II. La proportionnalité de la restriction d’accès au financement
A. L’adéquation de la mesure aux objectifs législatifs Le pouvoir réglementaire a entendu réserver le bénéfice du financement aux titulaires de compte entravés dans leurs déplacements par l’absence totale de titre. « En posant une telle condition d’éligibilité, le pouvoir réglementaire n’a pas méconnu les dispositions du code du travail ni commis d’erreur manifeste ». Cette restriction s’inscrit dans la volonté du législateur de faciliter l’accès à l’emploi par une meilleure mobilité des actifs sur le territoire. Le juge administratif valide donc l’usage du pouvoir de précision délégué par la loi pour encadrer la mobilisation des droits de formation. Ce choix politique de ciblage des bénéficiaires ne porte pas non plus une atteinte illégale aux droits fondamentaux des travailleurs.
B. L’absence de rupture du principe d’égalité Les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le décret méconnaîtrait le principe d’égalité entre les titulaires d’un compte personnel de formation. La différence de traitement repose sur une situation objectivement différente entre ceux qui possèdent déjà un titre et ceux qui en sont dépourvus. « La différence de traitement opérée par le décret attaqué entre ces deux catégories de personnes » est en rapport direct avec l’objet de la norme. Cette mesure n’apparaît pas manifestement disproportionnée au regard de l’intérêt général qui s’attache à favoriser l’insertion professionnelle des personnes les plus précaires. Le Conseil d’État confirme ainsi la pleine légalité de l’acte réglementaire et rejette les conclusions tendant à l’annulation pour excès de pouvoir.