8ème – 3ème chambres réunies du Conseil d’État, le 12 mars 2025, n°494160

Par une décision rendue le 12 mars 2025, le Conseil d’État précise les conditions d’imputation comptable de la taxe sur les excédents de provisions. Cette affaire concerne une société d’assurance ayant cherché à déduire de son résultat de l’exercice 2015 une taxe acquittée au titre de l’année précédente. L’administration fiscale a contesté cette déduction lors d’une vérification de comptabilité en se fondant sur l’évolution législative issue de la loi de finances rectificative. Le tribunal administratif de Montreuil a d’abord rejeté la demande de décharge de la société par un jugement rendu le 7 novembre 2022. La cour administrative d’appel de Paris a toutefois annulé ce jugement le 20 mars 2024 en autorisant la déduction litigieuse pour l’exercice clos en 2015. Le ministre de l’économie s’est pourvu en cassation afin d’obtenir l’annulation de cet arrêt souverain pour erreur de droit manifeste. La haute juridiction administrative doit déterminer si une taxe devenue non déductible peut néanmoins être imputée sur un exercice ultérieur en cas d’erreur comptable. Le Conseil d’État annule l’arrêt d’appel en jugeant que la taxe ne pouvait plus être déduite au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2015.

I. La fixation temporelle de la charge fiscale déductible

A. Le critère de la dette certaine dans son principe

La détermination de l’exercice d’imputation repose sur le moment où la taxe revêt « le caractère d’une dette certaine dans son principe et déterminée ». Le montant de l’imposition dépend directement du rapprochement entre les provisions constituées pour les sinistres et les indemnisations réellement versées aux assurés par l’entreprise. Cette constatation comptable permet d’identifier précisément l’exercice au cours duquel l’excédent de provisions apparaît de manière définitive dans les écritures de la société d’assurance.

B. L’impossibilité d’un report de déduction par erreur

Le juge de cassation censure le raisonnement consistant à autoriser la déduction d’une charge comptabilisée par erreur sur un exercice non concerné par l’imposition. La cour administrative d’appel de Paris a méconnu les règles de déductibilité en permettant l’imputation de la taxe sur le résultat imposable de l’année 2015. Une charge doit impérativement être rattachée à l’exercice au cours duquel elle est devenue une dette certaine pour ne pas fausser le résultat fiscal.

II. L’application impérative des nouvelles restrictions législatives

A. L’extinction du droit à déduction pour l’exercice 2015

La loi de finances rectificative pour 2014 dispose expressément que la taxe sur les excédents de provisions « n’est pas déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés ». Cette interdiction s’applique rigoureusement aux exercices clos à compter du 31 décembre 2015 conformément aux intentions claires exprimées par le législateur lors du vote. La société ne pouvait donc plus prétendre au bénéfice de cette déduction fiscale pour son bilan arrêté à la fin de l’année civile en question.

B. L’absence d’atteinte caractérisée aux espérances légitimes

Le contribuable ne peut invoquer une espérance légitime protégée par la Convention européenne des droits de l’homme pour contester l’application immédiate de la loi nouvelle. Les dispositions litigieuses ont été publiées au Journal officiel le 30 décembre 2014 afin de permettre aux opérateurs économiques d’anticiper les conséquences sur leur gestion. La société disposait de délais suffisants pour « comptabiliser la charge en cause au titre de l’exercice clos » ou pour former une réclamation contentieuse utile.

📄 Circulaire officielle

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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