Le Conseil d’État a rendu, le 25 juin 2025, une décision relative à la procédure d’admission des pourvois en cassation en matière fiscale. Le litige concernait initialement des compléments d’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux réclamés à deux contribuables pour les années 2012 à 2014. Le Tribunal administratif de Paris avait, par un jugement du 15 mars 2022, accordé une décharge partielle des impositions et des pénalités contestées. La Cour administrative d’appel de Paris a cependant annulé cette décision le 8 mars 2024, en rejetant la quasi-totalité des prétentions des requérants. Ces derniers ont alors saisi la juridiction suprême pour obtenir l’annulation de cet arrêt en invoquant plusieurs erreurs de droit et dénaturations. La question posée réside dans la détermination des moyens présentant un caractère sérieux permettant l’admission du pourvoi devant le juge de cassation. La haute juridiction administrative décide d’admettre le pourvoi uniquement en ce qu’il concerne un virement bancaire spécifique de 35 715,64 euros. L’analyse de cette décision conduit à observer d’abord la rigueur du filtrage des moyens de cassation, avant d’envisager l’admission partielle de la requête.
I. La mise en œuvre rigoureuse du filtrage des moyens de cassation
A. Le contrôle restreint opéré sur la régularité de l’arrêt
La décision commentée illustre l’application de l’article L. 822-1 du code de justice administrative organisant le filtrage préalable des pourvois en cassation. Selon ce texte, « l’admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n’est fondé sur aucun moyen sérieux ». Cette règle permet à la haute assemblée d’écarter les recours dont les chances de succès apparaissent manifestement insuffisantes ou trop fragiles. Les requérants soutenaient notamment que la Cour administrative d’appel de Paris avait entaché son arrêt d’une contradiction entre ses motifs et son dispositif. Ils critiquaient également le rejet d’un moyen relatif à la saisine de l’interlocuteur départemental au titre de certains redressements opérés. En écartant ces griefs au stade de l’admission, le Conseil d’État confirme sa volonté de limiter le débat aux seules erreurs juridiques manifestes.
B. L’irrecevabilité des critiques visant la méthode de reconstitution des recettes
La sévérité du juge de cassation s’exprime également à travers le rejet des moyens critiquant la méthode de reconstitution des recettes du restaurant exploité. Les contribuables prétendaient que cette méthode était « excessivement sommaire » ou « radicalement viciée », ce qui aurait dû entraîner la décharge totale des impositions. Le juge administratif considère toutefois que ces arguments ne présentent pas le degré de sérieux nécessaire pour justifier un examen au fond. Cette solution souligne la marge d’appréciation souveraine dont disposent les juges du fond dans l’établissement des faits et le contrôle des preuves. Le Conseil d’État refuse ainsi de s’immiscer dans l’analyse technique des recettes commerciales dès lors qu’aucune dénaturation n’est relevée. Cette rigueur procédurale précède logiquement l’examen des éléments ayant permis une admission partielle de la requête des contribuables.
II. L’admission ciblée d’un grief relatif au bien-fondé des impositions
A. La reconnaissance d’un moyen sérieux sur la nature d’un virement
Malgré une approche globalement restrictive, la haute juridiction identifie un point de droit méritant une analyse approfondie lors de la phase ultérieure du procès. Elle décide d’admettre les conclusions « en tant qu’il s’est prononcé sur les revenus d’origine indéterminée nés du virement de 35 715,64 euros ». Ce choix indique que les requérants ont réussi à démontrer le caractère sérieux d’une erreur d’appréciation juridique sur ce point précis. Le litige portait sur la preuve que ce crédit bancaire particulier ne constituait pas un revenu imposable pour le foyer fiscal. L’admission partielle permet donc de préserver les droits des administrés sur une fraction déterminée des impositions tout en validant le reste.
B. Les conséquences d’une admission limitée aux enjeux probatoires identifiés
Cette admission ciblée limite strictement le futur office du juge de cassation, qui ne pourra statuer que sur les conséquences de ce virement bancaire. Le surplus des conclusions est expressément rejeté, ce qui confère à l’arrêt d’appel une autorité de chose jugée pour les autres points. Cette technique de l’admission partielle favorise une bonne administration de la justice en évitant de rouvrir inutilement des débats déjà tranchés. Elle offre néanmoins une chance réelle d’obtenir l’annulation de la décision attaquée sur un montant financier qui demeure non négligeable. La portée de cette décision réside dans l’équilibre trouvé entre l’exigence de célérité et la protection nécessaire des citoyens face au fisc.