Le Conseil constitutionnel a rendu, le 29 juin 2000, une décision relative au contrôle d’une loi organique favorisant l’égal accès aux mandats électoraux. Cette réforme visait à instaurer une alternance obligatoire entre les candidats de chaque sexe sur les listes présentées dans plusieurs collectivités d’outre-mer. Une difficulté procédurale est apparue concernant l’adoption d’un amendement imposant cette règle d’alternance après la réunion de la commission mixte paritaire. Cette disposition avait pourtant été votée en termes identiques par les deux assemblées parlementaires avant l’engagement de la phase de conciliation finale. La loi fut transmise au juge constitutionnel afin de vérifier la régularité de cette adjonction tardive au regard des exigences de l’article 45. La question posée consistait à déterminer si un amendement peut modifier un texte déjà adopté de manière identique après la réunion de ladite commission. La haute juridiction a validé la procédure en considérant que l’amendement visait à assurer le respect du principe constitutionnel d’égalité entre les territoires. La rigueur de la procédure législative encadrant le droit d’amendement après la commission paritaire cède ici devant l’exigence supérieure de conformité au texte constitutionnel.
I. La délimitation du droit d’amendement après la phase de conciliation
A. L’affirmation de l’intangibilité des dispositions votées en termes identiques
Le juge précise d’abord les conditions d’exercice du droit d’amendement à chaque stade de la procédure législative sous réserve des limitations constitutionnelles. Il souligne que « des dispositions adoptées en termes identiques avant la réunion de la commission mixte paritaire ne sauraient, en principe, être modifiées après cette réunion ». Cette règle protège l’accord trouvé entre les deux assemblées et garantit la stabilité du texte soumis à la délibération finale des parlementaires. L’économie de l’article 45 s’oppose également à ce que des mesures nouvelles soient adoptées sans avoir fait l’objet d’un examen antérieur. La procédure de conciliation doit porter uniquement sur les points de désaccord subsistant entre les chambres au moment de la réunion des commissaires.
B. L’énumération limitative des exceptions autorisant une adjonction tardive
La décision prévoit néanmoins des dérogations précises permettant l’adoption d’amendements après la réunion de l’organe chargé de proposer un texte commun. Les modifications doivent être « soit en relation directe avec une disposition restant en discussion, soit dictées par la nécessité de respecter la Constitution ». Le Conseil admet également les corrections visant à assurer la coordination avec d’autres textes ou à rectifier une simple erreur de nature matérielle. Ces exceptions visent à préserver la cohérence juridique globale sans pour autant autoriser une remise en cause arbitraire des compromis parlementaires déjà conclus. Le respect scrupuleux de ces conditions de recevabilité permet alors au juge de justifier l’examen au fond de la mesure de correction territoriale.
II. La légitimation de l’amendement par l’impératif de conformité constitutionnelle
A. La prévention d’une rupture d’égalité entre les collectivités territoriales
Dans l’espèce commentée, les dispositions ajoutées tardivement avaient pour objectif de supprimer une différence de traitement injustifiée entre les divers territoires ultramarins. Le texte initial créait une disparité entre les règles électorales d’une collectivité et celles adoptées en lecture définitive pour les deux autres territoires. L’amendement visait ainsi à « faire disparaître l’atteinte au principe d’égalité résultant de la différence, sans rapport direct avec l’objet de la loi ». Le juge considère ici que cette harmonisation des règles de parité était indispensable pour garantir la validité substantielle de la loi organique soumise. La volonté de traiter uniformément des situations identiques justifie l’écart par rapport aux règles procédurales ordinaires régissant habituellement la navette parlementaire.
B. La primauté de la norme suprême sur la rigueur de la procédure législative
La juridiction conclut que l’article premier doit être regardé comme adopté selon une procédure conforme à la Constitution malgré l’adjonction tardive de l’alternance. Cette solution confirme que la nécessité de respecter les principes constitutionnels l’emporte sur l’interdiction de modifier des dispositions votées en termes identiques. Le contrôle exercé par le juge assure ainsi que la régularité formelle de la loi ne serve pas de vecteur à une inconstitutionnalité matérielle. La conformité globale du texte est préservée par l’application d’une exception dont la portée reste strictement encadrée par la jurisprudence du Conseil. Le dispositif final déclare l’ensemble de la loi organique conforme à la Constitution, validant ainsi définitivement les nouvelles règles de composition des assemblées.