Conseil constitutionnel, Décision n° 2001-457 DC du 27 décembre 2001

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 27 décembre 2001, une décision relative à la loi de finances rectificative pour la même année. Plusieurs sénateurs ont saisi la juridiction afin de contester la conformité de diverses dispositions législatives aux principes constitutionnels en vigueur. Les requérants invoquent notamment une atteinte aux libertés publiques, au principe d’égalité et aux règles de procédure parlementaire. La question centrale réside dans l’équilibre entre les prérogatives de l’administration et la protection de la vie privée des citoyens. Il convient également de s’interroger sur les limites du droit d’amendement au cours du processus législatif. Le juge constitutionnel rejette les griefs de fond mais censure plusieurs articles pour des motifs de procédure.

I. La validation de dispositions de fond sous le prisme d’une conciliation constitutionnelle équilibrée

A. La protection de la vie privée face aux impératifs de lutte contre la fraude

L’article 62 de la loi instaure un droit de communication au profit des services fiscaux et douaniers sur les données de télécommunications. Les sénateurs estiment que ces mesures sont « insuffisamment précisés et encadrés » et portent une atteinte excessive aux libertés individuelles. Le Conseil rappelle qu’il appartient au législateur d’assurer la conciliation entre l’exercice des libertés et la prévention des atteintes à l’ordre public. Le juge relève que le droit d’accès aux données porte « exclusivement sur l’identification des personnes » et les caractéristiques techniques des appels. Les dispositions excluent formellement toute immixtion dans le contenu des correspondances échangées entre les utilisateurs des services de télécommunication. La loi prévoit des garanties précises limitant la durée de conservation et encadrant strictement l’usage de ces informations techniques. Cette conciliation n’est entachée d’aucune erreur manifeste d’appréciation selon la haute juridiction qui valide ainsi le dispositif.

B. Le respect des principes d’égalité et de compétence législative en matière fiscale

L’article 27 accorde un crédit d’impôt pour la formation professionnelle mais en exclut les entreprises dépassant un certain chiffre d’affaires. Le Conseil constitutionnel juge que cette différence de traitement repose sur des critères objectifs et rationnels liés à la politique d’aide. Par ailleurs, l’article 68 prévoit une contribution forfaitaire pour le financement d’un fonds commun des accidents du travail agricole. Les requérants soutiennent que le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence en ne fixant pas directement le taux d’imposition. Le juge précise que cette contribution constitue un impôt de répartition dont le montant global est défini par les besoins financiers. Le Parlement a épuisé sa compétence en précisant les modalités de répartition entre les différents organismes assureurs concernés.

II. La sanction rigoureuse des irrégularités procédurales et des cavaliers budgétaires

A. La limitation stricte du droit d’amendement après la commission mixte paritaire

L’article 55 précise la déductibilité fiscale des excédents mis en réserves pour certaines coopératives mais résulte d’un amendement tardif. Cette disposition a été introduite dans le texte législatif après la réunion de la commission mixte paritaire chargée de concilier les assemblées. Le Conseil souligne que le droit d’amendement s’exerce à chaque stade de la procédure sous réserve de respecter l’économie de l’article 45. Les seuls amendements recevables après cette étape doivent présenter une relation directe avec une disposition restant en discussion parlementaire effective. L’article contesté ne répondait à aucune nécessité de coordination ou de correction d’erreur matérielle manifeste au moment de son adoption. La procédure est donc jugée irrégulière car elle prive les assemblées d’un examen approfondi du texte lors des lectures précédentes.

B. L’exclusion des dispositions étrangères au domaine exclusif des lois de finances

Enfin, les articles 39, 40, 41 et 47 traitent de l’organisation des collectivités territoriales et de la passation des marchés publics locaux. Ces mesures ne concernent pas la détermination des ressources et des charges de l’État ni l’information du Parlement sur les finances. Elles n’entraînent aucune création d’emplois publics et ne présentent pas le caractère de dispositions d’ordre fiscal au sens de l’ordonnance. Le Conseil constitutionnel qualifie ces dispositions de cavaliers budgétaires car elles sont totalement étrangères au domaine réservé des lois de finances. Leur présence au sein d’un texte financier méconnaît les règles organiques relatives à la présentation et au contenu des budgets étatiques. En conséquence, la juridiction déclare ces articles contraires à la Constitution sans se prononcer sur le fond de leur validité juridique.

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Hassan KOHEN
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