Conseil constitutionnel, Décision n° 2007-556 DC du 16 août 2007

Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 16 août 2007, examine la conformité d’une loi organisant le dialogue social et la continuité du service public. Cette réforme législative entendait réguler l’exercice du droit de grève au sein des entreprises de transports terrestres réguliers de voyageurs chargées d’une mission de service public. Des députés et sénateurs ont saisi la juridiction afin de contester plusieurs dispositions relatives à la négociation préalable et aux obligations déclaratives des salariés. Les requérants soutenaient que ces mesures portaient une atteinte excessive au droit de grève et méconnaissaient la compétence législative ainsi que la liberté contractuelle. Le problème de droit soumis au juge constitutionnel consistait à déterminer si le législateur pouvait imposer des contraintes procédurales strictes sans dénaturer le principe constitutionnel de grève. La Haute juridiction déclare les dispositions critiquées conformes à la Constitution en consacrant la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels et la continuité du service public.

I. Un encadrement procédural proportionné du droit de grève

A. La validation du mécanisme de négociation préalable

Le Conseil constitutionnel rappelle que le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent, conformément au Préambule de 1946. Les sages considèrent que le législateur peut imposer une négociation préalable au dépôt d’un préavis afin de favoriser la résolution amiable des conflits collectifs. L’extension du délai entre la notification des motifs et le début du mouvement, porté à treize jours, est jugée conforme aux exigences de continuité. Ce délai permet d’organiser un dialogue effectif tout en autorisant la mise en place d’un plan de transport adapté aux besoins essentiels de la population. L’intervention des organisations syndicales représentatives dans ce processus ne constitue pas une restriction injustifiée, car elle laisse entière la liberté de chaque travailleur. Le juge affirme que « le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle mais qu’il a des limites » fixées par la loi.

B. La constitutionnalité de l’obligation de déclaration individuelle

L’article 5 de la loi impose aux agents indispensables à l’exécution du service d’informer leur employeur de leur intention de faire grève. Cette déclaration doit intervenir quarante-huit heures à l’avance sous peine de sanctions disciplinaires prévues par le règlement intérieur de chaque entreprise concernée. Pour le juge constitutionnel, cette formalité ne saurait être étendue à l’ensemble des salariés mais doit se limiter à ceux dont la présence est déterminante. Cette mesure vise uniquement à permettre la réaffectation des personnels disponibles pour assurer les dessertes prioritaires définies par les autorités organisatrices de transport. Le Conseil souligne que cette obligation ne prive pas le salarié du droit de rejoindre un mouvement déjà engagé, sous réserve du respect du délai. Les garanties relatives au secret professionnel et à la protection de la vie privée assurent que ces informations ne seront pas détournées de leur objet.

II. Une organisation de la continuité respectueuse des équilibres institutionnels

A. La définition de niveaux de service par les autorités organisatrices

La loi confie aux autorités organisatrices de transport la mission de définir des dessertes prioritaires pour garantir les besoins essentiels de la population circulante. Cette compétence permet de déterminer différents niveaux de service en fonction de l’importance de la perturbation prévisible constatée lors d’un conflit social. Le Conseil constitutionnel juge que cette disposition ne constitue pas une réglementation déguisée du droit de grève, mais une mesure d’organisation du service public. Le principe d’égalité entre les usagers est ici préservé par la recherche d’une continuité minimale sur l’ensemble du territoire national lors des grèves. Les entreprises doivent ainsi élaborer un plan de transport adapté s’intégrant parfaitement dans les conventions d’exploitation conclues avec les autorités publiques compétentes. Cette organisation contractuelle renforce la prévisibilité du service sans introduire de discrimination injustifiée entre les opérateurs économiques de transport terrestre.

B. La sauvegarde de l’autonomie des collectivités territoriales

L’article 4 prévoit l’intervention du représentant de l’État en cas de carence de l’autorité organisatrice pour arrêter les priorités de desserte nécessaires. Les requérants y voyaient une atteinte à la libre administration des collectivités territoriales garantie par l’article 72 de la Constitution du 4 octobre 1958. Le juge constitutionnel rejette ce grief en rappelant le rôle du préfet dans le contrôle administratif et le respect des lois de la République. Le législateur peut valablement prévoir une substitution aux autorités décentralisées lorsque leur inaction risque de compromettre gravement le fonctionnement régulier des services publics. Par ailleurs, l’obligation de remboursement des usagers en cas d’inexécution du plan de transport ne méconnaît pas l’autonomie financière des collectivités locales. Cette responsabilité civile découle directement de l’article 4 de la Déclaration de 1789, imposant la réparation des préjudices causés par un défaut d’exécution. L’équilibre entre les prérogatives des autorités locales et les impératifs de l’ordre public est ainsi maintenu sous le contrôle du juge.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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