Conseil constitutionnel, Décision n° 2010-41 QPC du 29 septembre 2010

Le Conseil constitutionnel, par une décision rendue le 29 septembre 2010, s’est prononcé sur la constitutionnalité de l’article L. 121-4 du code de la consommation. Cette disposition prévoit que le tribunal doit ordonner la publication du jugement lorsqu’il condamne un auteur pour un délit de publicité mensongère. Des requérants ont contesté ce mécanisme devant la Cour de cassation, laquelle a renvoyé la question prioritaire de constitutionnalité aux juges de la rue Montpensier. Les auteurs de la saisine affirmaient que l’automatisme de cette peine méconnaissait les principes de nécessité et d’individualisation des sanctions garantis par la Déclaration de 1789. La juridiction constitutionnelle devait ainsi déterminer si le législateur peut imposer une mesure de publicité systématique sans priver le juge de son pouvoir d’appréciation. Les sages déclarent l’article conforme en soulignant que le magistrat conserve des prérogatives suffisantes pour adapter la sanction à la situation particulière du condamné. La décision sera analysée sous l’angle de la légitimité de la répression automatique, puis sous celui de la persistance de l’office du juge pénal.

I. La validation constitutionnelle d’une sanction automatique liée à l’infraction

A. Un objectif législatif de renforcement de la répression

L’article L. 121-4 contesté vise à « renforcer la répression des délits de publicité mensongère et à assurer l’information du public de la commission de tels délits ». Le Conseil reconnaît que la publicité obligatoire constitue une réponse adaptée à une infraction commise précisément par l’utilisation de supports de communication massifs. Cette peine accessoire ne poursuit pas seulement un but punitif mais remplit également une fonction de rétablissement de la vérité envers les consommateurs trompés. La sévérité voulue par le législateur s’inscrit dans une politique pénale cohérente destinée à protéger la loyauté des transactions commerciales au sein du marché.

B. Une adéquation entre la nature du délit et la sanction

L’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme pose que « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ». En l’espèce, la sanction de publication est considérée comme « directement liée à un comportement délictuel commis par voie de publicité » par la juridiction constitutionnelle. Le rapport étroit entre le mode opératoire de l’auteur et la mesure imposée suffit à justifier l’absence de disproportion manifeste de la disposition législative. Le principe de nécessité n’interdit pas au Parlement d’instituer des peines obligatoires dès lors qu’elles répondent à un besoin social clairement identifié et localisé.

II. Le maintien d’un pouvoir d’individualisation par le juge

A. La modulation discrétionnaire des modalités de diffusion

Le Conseil constitutionnel observe que le tribunal « peut ainsi en faire varier l’importance et la durée » de la publicité ordonnée lors du prononcé. L’application de l’article 131-35 du code pénal permet au magistrat de choisir les supports médiatiques et la teneur exacte des annonces à diffuser. Cette latitude technique garantit que la peine ne frappe pas chaque condamné avec une intensité uniforme sans égard pour la gravité réelle du dommage. L’individualisation se manifeste alors par le choix souverain des modalités d’exécution, préservant ainsi le rôle actif du juge dans la détermination de la sanction.

B. La faculté souveraine d’octroi d’une dispense de peine

La décision souligne enfin que le juge n’est pas privé de « la mise en oeuvre des dispositions du code pénal relatives à la dispense de peine ». Si les circonstances l’exigent, le magistrat peut donc écarter l’obligation de publication en constatant que le trouble causé par l’infraction a déjà cessé. Cette soupape de sécurité assure la compatibilité du texte avec l’exigence constitutionnelle selon laquelle la peine doit être « légalement appliquée » selon les espèces. Le maintien de cette prérogative globale confirme que l’automatisme n’est qu’apparent et laisse subsister une appréciation humaine fondamentale au cœur du procès pénal.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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