Conseil constitutionnel, Décision n° 2011-144 QPC du 30 juin 2011

Le Conseil constitutionnel, par une décision du 30 juin 2011, examine la conformité du financement de la prestation de compensation du handicap. Plusieurs départements soutiennent que l’insuffisance des ressources allouées par l’État pour cette mission obligatoire méconnaît le principe de libre administration. La loi du 11 février 2005 a créé cette prestation pour remplacer l’allocation compensatrice pour tierce personne en élargissant le champ des bénéficiaires. Les collectivités requérantes considèrent que la croissance des charges financières n’est pas compensée par des ressources équivalentes, entravant ainsi leur autonomie. Le Conseil d’État a transmis cette question prioritaire de constitutionnalité le 14 avril 2011 après avoir constaté le caractère sérieux des moyens soulevés. Le litige porte sur l’interprétation de l’article 72-2 de la Constitution relatif à l’accompagnement financier des extensions de compétences territoriales. Les juges déclarent les dispositions contestées conformes à la Constitution, sous une réserve d’interprétation impérative concernant l’ajustement futur des dispositifs financiers. Cette décision clarifie d’abord les obligations de l’État lors d’une extension de compétences avant de préciser les garanties nécessaires à la sauvegarde de l’autonomie locale.

I. L’affirmation d’un régime juridique de financement encadré

A. La qualification d’une extension de compétences obligatoire

Le Conseil constitutionnel relève que la prestation de compensation du handicap constitue « pour les départements, une extension de leurs compétences ». Cette mesure remplace l’ancien dispositif de manière progressive afin de mieux couvrir les besoins liés à la perte d’autonomie. Le juge souligne que le champ des charges supportées par les personnes handicapées se trouve élargi par cette intervention publique nouvelle. La Constitution impose que toute création de compétence augmentant les dépenses locales soit accompagnée de ressources déterminées par la loi. Cette obligation ne concerne toutefois que les compétences présentant un caractère obligatoire pour les collectivités territoriales concernées.

B. L’appréciation souveraine du niveau de compensation par le législateur

L’exigence constitutionnelle n’impose pas au législateur d’affecter une ressource particulière ou de maintenir dans le temps une affectation précise. Le Conseil juge que les autorités compétentes disposent d’un pouvoir d’appréciation pour déterminer le niveau des ressources allouées à ces missions. Le concours de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie est financé par une fraction des contributions de solidarité. Ces ressources proviennent notamment d’une contribution de 0,3 % due par les employeurs privés et publics sur l’assiette des cotisations sociales. Le législateur respecte ainsi son obligation d’accompagner l’extension de compétences par des moyens financiers dont il juge librement le montant initial.

II. La protection vigilante de la libre administration locale

A. L’existence de dispositifs de péréquation et de garantie

Le code de l’action sociale et des familles prévoit des critères démographiques et financiers pour répartir les fonds entre les départements. Le mécanisme de sauvegarde dispose que les charges nettes ne peuvent excéder un pourcentage du potentiel fiscal fixé par voie réglementaire. Les dépenses dépassant ce seuil sont alors prises en charge en totalité par la caisse nationale afin de soulager les budgets locaux. Ce dispositif technique vise à prévenir une dénaturation du principe de libre administration des collectivités territoriales énoncé à l’article 72. Le juge constitutionnel valide cette architecture car elle intègre des instruments de correction destinés à limiter l’impact financier de la prestation.

B. Une conformité sous réserve de l’efficacité des mesures correctrices

La validité de la loi est assortie d’une réserve d’interprétation exigeant que le pouvoir réglementaire fixe un pourcentage de reste à charge raisonnable. Le Conseil affirme qu’il « appartiendrait aux pouvoirs publics de prendre les mesures correctrices appropriées » si l’augmentation des charges devenait excessive. Cette injonction garantit que le dispositif de financement ne puisse pas, par son insuffisance, vider de sa substance l’autonomie financière départementale. Le juge se réserve ainsi la possibilité de censurer ultérieurement une carence manifeste des autorités publiques dans l’ajustement des ressources. La décision assure un équilibre entre les prérogatives budgétaires de l’État et la protection constitutionnelle des libertés locales.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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