Conseil constitutionnel, Décision n° 2011-200 QPC du 2 décembre 2011

Le Conseil constitutionnel, par sa décision numéro 2011-200 QPC du 2 décembre 2011, s’est prononcé sur la conformité de l’organisation de la Commission bancaire à la Constitution. Cette question prioritaire de constitutionnalité porte sur la séparation des fonctions de poursuite et de jugement au sein d’une autorité administrative investie d’un pouvoir de sanction. Une société a contesté plusieurs dispositions du code monétaire et financier relatives au fonctionnement de cet organisme de contrôle lors d’une procédure devant la juridiction administrative. Elle estimait que le cumul des pouvoirs de contrôle et de sanction méconnaissait les principes d’indépendance et d’impartialité découlant de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme. Le problème juridique réside dans la compatibilité du cumul des fonctions d’instruction et de jugement avec l’exigence constitutionnelle d’impartialité des juridictions statuant en matière disciplinaire. Le Conseil déclare les dispositions contraires à la Constitution car elles n’organisent pas une séparation suffisante entre les autorités de poursuite et de jugement.

**I. L’exigence de séparation des fonctions répressives**

**A. La nature juridictionnelle de la Commission bancaire**

La Commission bancaire est expressément chargée de contrôler le respect des règles applicables aux établissements de crédit et de « sanctionner les manquements constatés ». L’article L. 613-23 du code monétaire et financier précise explicitement que lorsqu’elle statue en matière disciplinaire, elle constitue une « juridiction administrative ». Cette qualification législative impose le respect rigoureux des principes fondamentaux attachés à l’exercice de la fonction de juger dans un État de droit. Les Sages rappellent que « les principes d’indépendance et d’impartialité sont indissociables de l’exercice de fonctions juridictionnelles » conformément aux exigences constitutionnelles.

**B. Le constat d’une méconnaissance du principe d’impartialité**

Le grief de la requérante reposait sur l’absence de distinction entre l’organe qui engage les poursuites et celui qui prononce la sanction disciplinaire finale. Le Conseil relève que l’organisation contestée ne sépare pas les « fonctions de poursuite des éventuels manquements » et les « fonctions de jugement des mêmes manquements ». Cette confusion des rôles au sein d’une même entité crée un doute légitime sur l’impartialité objective de la formation de jugement saisie. En conséquence, les dispositions sont jugées contraires à l’article 16 de la Déclaration de 1789 qui garantit la séparation des pouvoirs et la garantie des droits.

**II. La portée de la censure constitutionnelle**

**A. Une remise en cause des pouvoirs de sanction des autorités administratives**

Cette décision s’inscrit dans un mouvement de juridictionnalisation des autorités de régulation dont le pouvoir de sanction doit désormais offrir des garanties procédurales substantielles. Les juges constitutionnels imposent une structure organique évitant que les mêmes services puissent successivement instruire un dossier puis condamner le professionnel concerné. Cette exigence renforce la protection des administrés face à des organismes dotés de prérogatives exorbitantes du droit commun en matière de régulation financière. La décision marque la fin d’une organisation jugée attentatoire aux libertés individuelles et aux principes d’un procès équitable garantis par le bloc de constitutionnalité.

**B. L’aménagement des effets dans le temps de la déclaration d’inconstitutionnalité**

Le Conseil constitutionnel utilise les pouvoirs conférés par l’article 62 de la Constitution pour fixer les limites de l’abrogation des textes législatifs déclarés invalides. Il précise que « la déclaration d’inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication » de la décision afin de préserver la sécurité juridique des décisions passées. Toutefois, cette censure est « applicable à toutes les instances non définitivement jugées à cette date », permettant ainsi aux requérants actuels de s’en prévaloir. Cette modulation protège les situations consolidées tout en garantissant l’application immédiate du principe d’impartialité aux procédures disciplinaires encore en cours d’examen.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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