Conseil constitutionnel, Décision n° 2012-240 QPC du 4 mai 2012

Par sa décision du 4 mai 2012, le Conseil constitutionnel examine la conformité de la définition du harcèlement sexuel aux principes fondamentaux du droit français. Un justiciable poursuivi pour ce délit a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité contre l’article 222-33 du code pénal alors en vigueur. Le requérant soutenait que l’imprécision des termes employés méconnaissait le principe de légalité des délits et des peines garanti par la Déclaration de 1789. La juridiction constitutionnelle devait trancher si la loi définissait l’infraction de manière assez précise pour permettre aux citoyens de connaître l’étendue de l’interdit. Les juges ont déclaré la disposition inconstitutionnelle en raison de son manque de clarté tout en ordonnant l’abrogation immédiate du texte législatif vicié. L’analyse portera d’abord sur l’exigence de précision de la loi pénale avant d’analyser les effets de cette censure sur l’ordonnancement juridique actuel.

I. L’affirmation rigoureuse de l’exigence de clarté de la norme pénale

A. Le fondement constitutionnel du principe de légalité

Le Conseil rappelle que le législateur doit fixer lui-même le champ d’application de la loi pénale en vertu de l’article 34 de la Constitution. Cette obligation découle aussi de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme imposant de « définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs ». La sécurité juridique impose que chaque citoyen puisse prévoir les conséquences de ses actes et les sanctions pénales auxquelles il s’expose éventuellement.

B. Le constat de l’insuffisance de la définition législative

L’article 222-33 prévoyait simplement de réprimer « le fait de harceler autrui dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle » sans autre précision matérielle. Les réformes successives avaient supprimé les mentions relatives aux ordres ou aux menaces qui constituaient auparavant des critères matériels indispensables à la qualification du délit. L’absence de description des comportements prohibés laissait un pouvoir d’interprétation trop vaste aux magistrats chargés de réprimer les faits de harcèlement sexuel.

II. Les conséquences juridiques d’une déclaration d’inconstitutionnalité immédiate

A. La sanction nécessaire d’une incrimination juridiquement viciée

Le Conseil estime que « le délit de harcèlement sexuel soit punissable sans que les éléments constitutifs de l’infraction soient suffisamment définis » par le législateur national. Cette carence législative entraîne inévitablement la censure du texte puisque la loi ne remplit plus sa fonction de garantie contre l’arbitraire du pouvoir répressif. La décision confirme ainsi que la protection des libertés individuelles prime sur la volonté répressive lorsque la règle de droit manque de prévisibilité.

B. Une abrogation immédiate aux effets contentieux majeurs

L’inconstitutionnalité prononcée entraîne l’abrogation de l’article 222-33 du code pénal à compter de la date de publication de la décision au Journal officiel de la République. Le Conseil précise que cette annulation s’applique à toutes les affaires non jugées définitivement ce qui provoque l’extinction immédiate de nombreuses poursuites pénales en cours. Cette solution rigoureuse souligne la responsabilité du Parlement dans la rédaction des textes répressifs tout en créant un vide juridique temporaire dans notre droit.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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