Par une décision du 28 juin 2013, le Conseil constitutionnel a examiné la conformité à la Constitution de l’article L. 135-1 du code de l’action sociale et des familles. L’association requérante a soutenu que cette disposition méconnaissait la légalité des délits ainsi que la nécessité et la proportionnalité des peines. Le Conseil a soulevé d’office le grief tiré de l’atteinte au principe d’égalité devant la loi pénale garanti par la Déclaration de 1789.
Le texte contesté punissait la perception frauduleuse de prestations d’aide sociale des peines de l’escroquerie, soit cinq ans d’emprisonnement et une forte amende. En revanche, la fraude au revenu de solidarité active ou à l’allocation aux adultes handicapés n’encourait qu’une amende de cinq mille euros. Cette dualité de traitement soulevait la question de savoir si le législateur pouvait punir différemment des agissements de nature identique sans justification.
Le Conseil constitutionnel a déclaré la disposition inconstitutionnelle en soulignant que la loi pénale ne saurait instituer des peines différentes pour une même infraction. L’analyse de cette décision conduit à étudier la consécration de l’identité des comportements frauduleux avant d’aborder la sanction d’une rupture injustifiée d’égalité.
I. La consécration de l’identité des comportements frauduleux
A. Le constat d’une dualité d’incriminations concurrentes Le Conseil relève que l’article contesté punit la perception frauduleuse des prestations d’aide sociale des peines réprimant l’escroquerie définies par le code pénal. Parallèlement, le code de la sécurité sociale punit d’une amende de cinq mille euros les fausses déclarations pour obtenir d’autres prestations sociales. Des faits qualifiés de façon identique peuvent donc, selon le texte choisi par les autorités de poursuite, faire encourir des sanctions de gravité disproportionnée.
B. L’exigence d’un rapport direct avec l’objet de la loi Le juge constitutionnel rappelle que le principe d’égalité « ne fait pas obstacle à ce qu’une différenciation soit opérée entre agissements de nature différente ». Cependant, une différence de traitement doit impérativement être justifiée par une différence de situation en rapport direct avec l’objet de la loi. En l’espèce, aucune raison valable ne semble expliquer pourquoi certaines fraudes sociales seraient punies plus sévèrement que d’autres comportements similaires.
Cette identité de situation impose une cohérence normative que le Conseil constitutionnel s’attache à rétablir par une sanction rigoureuse de la rupture d’égalité.
II. La sanction d’une rupture injustifiée d’égalité pénale
A. L’appréciation de la disproportion des peines encourues Le Conseil considère que la différence entre les peines encourues méconnaît le principe d’égalité devant la loi pénale en raison de son importance majeure. Les juges soulignent qu’une telle disparité implique également des conséquences notables sur la procédure applicable et sur les effets d’une éventuelle condamnation pénale. Cette hétérogénéité législative porte atteinte à la cohérence du système répressif et aux droits fondamentaux des citoyens face à la puissance publique.
B. L’organisation des effets de l’abrogation constitutionnelle La déclaration d’inconstitutionnalité entraîne l’abrogation de la disposition à compter de la publication de la décision au Journal officiel de la République française. Le Conseil précise que cette abrogation est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date par les juridictions répressives compétentes. Cette décision garantit ainsi que les principes de nécessité et d’égalité devant la peine soient respectés pour l’ensemble des procédures en cours.