Conseil constitutionnel, Décision n° 2014-395 QPC du 7 mai 2014

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 7 mai 2014, une décision majeure relative à la mise en œuvre du principe de participation du public en matière environnementale. Cette affaire trouve son origine dans une question prioritaire de constitutionnalité contestant la conformité des articles L. 222-1 à L. 222-3 du code de l’environnement. Ces dispositions législatives régissent l’élaboration des schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie, ainsi que des schémas régionaux éoliens annexés. Des associations requérantes soutiennent que le législateur a failli à sa compétence en ne définissant pas précisément les modalités de participation des citoyens. Elles invoquent notamment la violation de l’article 7 de la Charte de l’environnement garantissant le droit de participer aux décisions publiques ayant une incidence écologique. Le Conseil d’État a transmis cette interrogation au juge constitutionnel afin de vérifier si le renvoi général au pouvoir réglementaire respecte la Constitution. La question posée est de savoir si le législateur peut déléguer par décret les conditions de participation sans fixer lui-même les garanties essentielles du droit constitutionnel. Le Conseil constitutionnel juge qu’en omettant de préciser les conditions et les limites de ce droit, le législateur méconnaît l’étendue de sa propre compétence constitutionnelle. Cette décision conduit à l’examen de la qualification des schémas environnementaux avant d’analyser la sanction de l’insuffisance législative par la déclaration d’inconstitutionnalité.

I. L’identification d’une décision publique ayant une incidence sur l’environnement

A. La reconnaissance de la portée environnementale des schémas régionaux

Le juge constitutionnel examine d’abord le contenu normatif des schémas régionaux du climat pour déterminer si l’article 7 de la Charte leur est applicable. Ces documents fixent des orientations fondamentales pour atténuer le changement climatique et définir des objectifs qualitatifs en matière de valorisation de l’énergie terrestre. Ils incluent également un volet spécifique pour le développement de l’énergie éolienne en identifiant les zones favorables à l’implantation des installations terrestres de production. Le Conseil souligne que « le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie et le schéma régional éolien ont pour objet de fixer des objectifs et des orientations en matière de préservation de l’environnement ». Cette constatation permet d’ancrer le litige dans le champ des droits constitutionnels garantis par le bloc de constitutionnalité concernant la préservation de la biosphère.

B. L’assujettissement des documents de planification au principe de participation

La décision établit un lien direct entre les objectifs de planification régionale et l’obligation de consulter le public lors de leur phase d’élaboration. Le Conseil relève que plusieurs autres plans administratifs doivent impérativement être compatibles avec ces schémas régionaux pour assurer une cohérence territoriale globale. Il en déduit que ces actes administratifs « sont des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement au sens de l’article 7 de la Charte de l’environnement ». Cette qualification juridique impose au législateur de garantir l’effectivité du droit de participation pour toute personne intéressée par ces projets publics. Dès lors, le cadre législatif doit impérativement contenir des dispositions protectrices suffisantes pour permettre une influence réelle des citoyens sur le processus décisionnel environnemental.

II. La sanction constitutionnelle de l’insuffisance du cadre législatif

A. La caractérisation de l’incompétence négative du législateur

Le litige se concentre sur l’insuffisance des dispositions de l’article L. 222-2 du code de l’environnement concernant la mise à disposition électronique du projet. Le législateur a simplement prévu une durée minimale d’un mois sans organiser davantage les modalités concrètes permettant une participation effective et éclairée du public. Le Conseil constitutionnel observe que « le législateur s’est borné à prévoir le principe de la participation du public sans préciser les conditions et les limites » de ce droit. Cette lacune constitue une incompétence négative car le Parlement délègue indûment sa compétence législative au profit exclusif d’un décret en Conseil d’État. Le juge conclut qu’en agissant ainsi, « le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence » et prononce l’inconstitutionnalité de la première phrase de l’alinéa contesté.

B. L’aménagement temporel des effets de la déclaration d’inconstitutionnalité

La décision de censure s’accompagne d’une modulation nécessaire pour préserver la sécurité juridique des actes administratifs déjà adoptés sous l’empire de la loi critiquée. Le juge estime qu’une abrogation immédiate entraînerait des perturbations administratives majeures susceptibles de nuire gravement à la continuité de l’action publique environnementale régionale. Le Conseil affirme que « la remise en cause des effets produits par les dispositions déclarées contraires à la Constitution aurait des conséquences manifestement excessives ». Il décide en conséquence de reporter la date d’abrogation effective de la disposition litigieuse au premier janvier de l’année suivant le prononcé. Ce délai permet au pouvoir législatif d’adopter de nouvelles normes conformes aux exigences de l’article 7 de la Charte sans paralyser les procédures engagées.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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