Conseil constitutionnel, Décision n° 2016-595 QPC du 18 novembre 2016

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 18 novembre 2016, une décision relative à la conformité de l’article L. 541-22 du code de l’environnement aux droits garantis. Cette disposition législative permettait à l’administration de fixer les conditions d’exercice de l’activité d’élimination de certains déchets par voie réglementaire. Des sociétés industrielles ont soulevé une question prioritaire de constitutionnalité lors d’un litige relatif à leur activité spécialisée. La chambre criminelle de la Cour de cassation a transmis cette question au Conseil constitutionnel par un arrêt rendu le 10 août 2016. Les requérantes soutiennent que l’absence de procédure de participation du public méconnaît l’article 7 de la Charte de l’environnement. Elles reprochent au législateur d’avoir exercé sa compétence de manière incomplète en omettant de garantir ce droit fondamental. Le juge constitutionnel doit déterminer si l’absence de garanties pour la participation du public à ces mesures réglementaires constitue une inconstitutionnalité caractérisée. Le Conseil déclare la disposition contraire à la Constitution pour la période comprise entre l’année 2005 et l’année 2010.

I. L’identification d’une carence législative au regard des exigences environnementales

Le juge constitutionnel relève que l’élimination des déchets comporte des opérations susceptibles de causer des nuisances manifestes à l’environnement. Il précise que les décisions réglementaires fixant ces conditions « constituent des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement au sens de l’article 7 de la Charte ». Cette qualification juridique déclenche l’obligation pour le législateur de prévoir des modalités concrètes de participation du public. L’activité de stockage ou de traitement des déchets entre nécessairement dans le champ d’application des principes de protection constitutionnelle. Le législateur ne pouvait donc pas déléguer ce pouvoir à l’autorité administrative sans encadrer strictement les droits des citoyens.

Le grief principal portait sur l’incompétence négative du législateur affectant directement le droit de participation protégé par la Charte. Le juge constate qu’entre le 3 mars 2005 et le 14 juillet 2010, « aucune disposition législative n’assurait la mise en œuvre du principe de participation ». En s’abstenant d’édicter de telles règles procédurales, le législateur a directement méconnu les exigences impératives de l’article 7 précité. Cette omission constitue une méconnaissance de sa propre compétence dont le Conseil tire les conséquences juridiques nécessaires pour cette période. La carence législative est ainsi sanctionnée car elle prive de garanties légales un droit constitutionnel fondamental pour la protection de la nature.

II. La modulation temporelle de la conformité constitutionnelle

L’inconstitutionnalité relevée par le Conseil est toutefois limitée dans le temps par l’adoption ultérieure de la loi du 12 juillet 2010. Ce nouveau texte a inséré l’article L. 120-1 dans le code de l’environnement pour définir les conditions de la participation. Le Conseil estime que « l’entrée en vigueur de ces dispositions, le 14 juillet 2010, a ainsi mis fin à l’inconstitutionnalité constatée ». La conformité est donc rétablie pour l’avenir grâce à l’intervention du législateur qui a comblé le vide juridique existant. Le juge valide la régularisation opérée par le pouvoir législatif avant même que la saisine constitutionnelle ne soit effectuée. Cette analyse permet de maintenir la validité des règlements édictés après l’intervention de la nouvelle loi.

La déclaration d’inconstitutionnalité produit des effets immédiats sans que le juge ne décide de reporter la date de l’abrogation législative. Cette décision « peut être invoquée dans toutes les instances introduites et non jugées définitivement » à la date de sa publication officielle. Le Conseil constitutionnel use de son pouvoir de modulation pour garantir l’effet utile de sa censure aux sociétés requérantes. Cette solution juridique assure une protection effective des droits tout en respectant la stabilité des situations définitivement acquises. Le juge concilie ainsi le principe de légalité constitutionnelle avec les nécessités de la sécurité juridique dans le domaine du droit de l’environnement.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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