Le Conseil constitutionnel a été saisi par soixante députés afin d’examiner la conformité à la Constitution d’un accord économique et commercial global. Cet engagement international, signé le 30 octobre 2016, organise les échanges commerciaux entre un État tiers et une organisation internationale régionale. Les auteurs de la saisine contestaient principalement le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et puissances publiques prévu au chapitre huit. Ils estimaient que l’accord affectait les conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale et méconnaissait le principe constitutionnel de précaution. Le juge constitutionnel devait décider si la ratification de ce traité mixte nécessitait une révision préalable de la norme suprême. La décision n° 2017-749 DC du 31 juillet 2017 écarte les griefs en analysant d’abord la répartition des compétences.
I. L’encadrement des compétences transférées et la sauvegarde de la souveraineté
A. La dualité du contrôle juridictionnel selon le partage des compétences
La juridiction constitutionnelle distingue les stipulations relevant de la compétence exclusive de l’organisation régionale de celles relevant d’une compétence partagée. Pour les premières, le contrôle se limite à vérifier l’absence d’atteinte à une « règle ou un principe inhérent à l’identité constitutionnelle ». Cette approche respecte les dispositions relatives à la participation à l’organisation régionale tout en maintenant la primauté de la charte fondamentale. Les juges considèrent que les transferts de compétences déjà consentis justifient cette limitation du contrôle juridictionnel aux principes essentiels. Ils affirment que seul le juge compétent de l’organisation peut contrôler la compatibilité de ces stipulations avec le droit dérivé.
B. La limitation des prérogatives du tribunal international d’investissement
Le mécanisme de règlement des différends ne porte pas atteinte aux conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale selon la haute instance. Les juges soulignent que le tribunal institué ne possède aucun pouvoir d’annulation des décisions prises par les organes des puissances contractantes. Son pouvoir de décision couvre exclusivement le versement de dommages pécuniaires ou la restitution de biens en cas de violation des obligations. L’accord précise d’ailleurs que « l’exécution de la sentence est régie par la législation relative à l’exécution des jugements en vigueur ». Cette préservation du pouvoir normatif s’accompagne d’un examen rigoureux des garanties procédurales et des objectifs de protection.
II. La validation des garanties juridiques et environnementales offertes par l’accord
A. La garantie de l’indépendance juridictionnelle et du principe d’égalité devant la loi
Le statut des membres du tribunal d’investissement répond aux exigences constitutionnelles d’indépendance et d’impartialité indissociables de l’exercice de fonctions juridictionnelles. L’article 8.30 de l’accord prévoit expressément que les membres du tribunal sont indépendants et n’ont d’attache avec aucun gouvernement. La juridiction écarte également le grief relatif à la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi concernant le recours à cette instance. La différence de traitement entre les catégories d’investisseurs repose sur un motif d’intérêt général lié au développement des échanges économiques. Cette distinction est en rapport direct avec l’objet de l’engagement visant à renforcer les relations commerciales entre les puissances signataires.
B. L’effectivité du principe de précaution dans la coopération réglementaire
La protection de l’environnement demeure assurée malgré l’absence de mention explicite du principe de précaution dans certaines stipulations de l’engagement international. La juridiction rappelle que la Charte de l’environnement impose aux autorités publiques de veiller à l’évaluation des risques graves et irréversibles. L’accord autorise les parties à adopter des mesures préventives même en cas d’absence de certitude scientifique absolue sur un dommage potentiel. Les juges notent que les stipulations visent à « prévenir la dégradation de l’environnement » par l’adoption de mesures économiquement efficaces. L’ensemble de ces motifs conduit la juridiction à déclarer que l’accord ne comporte aucune clause contraire à la Constitution.