Conseil constitutionnel, Décision n° 2018-728 QPC du 13 juillet 2018

Par une décision rendue le 13 juillet 2018, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité de dispositions relatives à la prévoyance collective. La question portait sur une indemnité de résiliation imposée aux souscripteurs pour compenser l’allongement de la durée de travail des assurés. Une structure associative avait contesté la constitutionnalité de l’article 31 de la loi du 31 décembre 1989 modifiée par la loi du 9 novembre 2010. La Cour de cassation a transmis cette question prioritaire de constitutionnalité par un arrêt du 17 mai 2018. L’association requérante soutenait que l’obligation de verser une indemnité non prévue initialement méconnaissait gravement la garantie des droits constitutionnels. Elle invoquait également une atteinte disproportionnée au principe fondamental du maintien des conventions légalement conclues par les parties. Le problème juridique résidait dans la possibilité pour le législateur d’imposer une charge financière nouvelle aux contrats de prévoyance en cours. Les sages ont déclaré les dispositions contestées conformes à la Constitution en se fondant sur un motif d’intérêt général suffisant.

**I. L’encadrement législatif des conséquences financières de la réforme des retraites**

**A. La justification technique de l’indemnité de résiliation**

La réforme des retraites de 2010 a mécaniquement prolongé la durée de versement des prestations d’incapacité et d’invalidité par les organismes assureurs. Pour équilibrer ce surcoût, le législateur a autorisé un étalement des provisions techniques nécessaires à la couverture de ces engagements sociaux. L’indemnité litigieuse correspond à la « différence entre le montant des provisions techniques permettant de couvrir intégralement les engagements » et celles effectivement constituées. Cette somme devient exigible lorsque le souscripteur décide de rompre le contrat avant le terme de la période transitoire de six ans.

**B. La validation d’une application temporelle étendue**

Le mécanisme s’applique aux contrats en cours mais aussi à ceux ayant pris fin entre janvier 2010 et la promulgation de la loi. Le Conseil constitutionnel souligne que ces contrats continuent de « produire des effets après leur résiliation ou leur non-renouvellement » au profit des bénéficiaires. Cette rétroactivité apparente est justifiée par la nécessité de lisser l’impact financier de la réforme sur l’ensemble du secteur de la prévoyance. La loi permet ainsi aux assureurs de faire face à l’accroissement imprévu de leurs obligations de provisionnement sans déstabiliser leurs fonds propres.

**II. La primauté de l’intérêt général sur la stabilité contractuelle**

**A. La sauvegarde de la pérennité des régimes de prévoyance**

Le juge constitutionnel rappelle qu’il peut limiter la liberté contractuelle pour des « exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général ». En l’espèce, la mesure vise à « garantir l’effectivité et la pérennité de la couverture des salariés » malgré l’augmentation des risques financiers. L’objectif consiste également à éviter une « hausse brutale des cotisations versées par les autres souscripteurs » restés fidèles à leur organisme. La protection de la mutualisation entre les assurés justifie alors l’imposition d’une contribution financière au souscripteur qui souhaite quitter le système prématurément.

**B. Le contrôle de proportionnalité de l’atteinte aux droits**

L’atteinte au droit au maintien des conventions n’est pas jugée disproportionnée car l’indemnité est strictement limitée aux provisions restant à constituer. Le législateur a ainsi concilié les intérêts des assureurs, des employeurs et des salariés dans un contexte de réforme structurelle indispensable. La décision confirme que la garantie des droits n’interdit pas au législateur de modifier les effets passés des contrats en cours. Cette solution assure finalement la cohérence du système de protection sociale complémentaire face aux évolutions démographiques et législatives de la nation.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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