Le Conseil constitutionnel a rendu, le 29 mars 2019, une décision portant sur la conformité de l’article L. 132-16 du code minier à la Constitution française. Cette disposition instaure une redevance progressive calculée sur la production annuelle d’hydrocarbures liquides pour les titulaires de concessions de mines d’hydrocarbures situées sur le territoire national. La société requérante conteste l’augmentation de ce prélèvement financier opérée par la loi de finances rectificative pour 2017 au regard de la liberté d’entreprendre. Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil d’État le 11 janvier 2019, le juge constitutionnel doit apprécier la validité de cette charge fiscale. La requérante soutient notamment que le cumul des différentes impositions minières méconnaîtrait le principe d’égalité devant les charges publiques garanti par la Déclaration des droits de l’homme. Elle affirme que le taux appliqué à la tranche supérieure de production revêtirait désormais un caractère confiscatoire excessif pour les entreprises exploitant des gisements d’huile brute. Le législateur peut-il augmenter le taux d’une redevance minière sans méconnaître les facultés contributives des assujettis ou rompre l’égalité devant les charges publiques de l’État ? Le Conseil constitutionnel écarte les griefs et déclare la disposition conforme en validant les critères objectifs retenus par le législateur pour frapper la capacité contributive. L’étude de cette décision nécessite d’analyser la rationalité de la contribution minière avant d’étudier l’absence de caractère confiscatoire de la redevance pour les exploitants.
I. L’affirmation de la rationalité de la contribution minière
A. La fin d’un régime fiscal dérogatoire et incitatif
L’article L. 132-16 du code minier assujettit désormais les titulaires de concessions à une redevance annuelle au profit de l’État et de la sécurité sociale. La loi de finances rectificative pour 2017 « a pour objet de mettre fin à la fiscalité incitative dont bénéficiaient les titulaires » depuis plusieurs années. Le Conseil constitutionnel valide ce changement de paradigme en rappelant que le législateur peut modifier une fiscalité passée pour répondre à de nouveaux impératifs économiques. Cette modification législative traduit la volonté du pouvoir politique de soumettre l’exploitation des ressources naturelles à une contribution financière plus importante au bénéfice de l’intérêt général. La liberté d’entreprendre ne saurait ainsi faire obstacle à l’établissement d’une imposition nouvelle dès lors qu’elle ne porte pas une atteinte disproportionnée à l’activité.
B. La pertinence de l’assiette fondée sur la production réelle
Le législateur a choisi de fonder son appréciation sur des « critères objectifs et rationnels en faisant porter la redevance sur la production annuelle d’huile brute ». Cette modalité de calcul permet de corréler directement le prélèvement à l’activité réelle de l’entreprise sans introduire de distinction arbitraire entre les différents exploitants. Le juge constitutionnel estime que le dispositif répond correctement à l’exigence constitutionnelle de répartition de la contribution commune en raison des facultés contributives des assujettis. L’établissement d’un barème progressif par tranches de production constitue un mécanisme classique permettant d’adapter la charge fiscale à la taille et à la rentabilité des exploitations. Cette structuration de l’impôt garantit que les prélèvements demeurent en adéquation avec les bénéfices potentiels générés par l’extraction des ressources fossiles sur le territoire.
II. L’absence de caractère confiscatoire de la redevance
A. La mesure de la charge pesant sur l’activité d’extraction
La requérante dénonçait l’application d’un taux de 8 % pour la tranche de production annuelle d’huile brute égale ou supérieure à 1 500 tonnes extraites. Le Conseil constitutionnel considère que ce taux ne fait pas peser sur les titulaires de concessions « une charge excessive au regard de leurs facultés contributives ». Cette solution s’appuie sur le constat que ce barème n’est pas inédit puisqu’il s’appliquait déjà à une partie de la production extraite auparavant. Le juge refuse ainsi de censurer une augmentation de la pression fiscale qui demeure dans des limites raisonnables au regard des rendements de l’industrie pétrolière. La conformité à la Constitution est assurée tant que le prélèvement n’absorbe pas une part disproportionnée des revenus issus de l’exploitation des hydrocarbures liquides.
B. L’inopérance des arguments relatifs au cumul d’impositions
Le grief tiré d’un effet confiscatoire résultant du cumul avec la taxe tréfoncière est jugé inopérant par le juge constitutionnel car celle-ci constitue une simple contrepartie. Le Conseil distingue précisément les prélèvements fiscaux des redevances de droit privé versées aux propriétaires des terrains exploités par les titulaires de concessions minières. Le cumul de la redevance progressive avec les taxes locales « ne présente pas un caractère confiscatoire » au regard des tarifs modérés appliqués par les collectivités. Cette décision confirme la large marge de manœuvre du législateur en matière fiscale tant qu’aucune rupture caractérisée de l’égalité devant les charges n’est démontrée. Les entreprises doivent ainsi supporter la charge commune indispensable au fonctionnement des services publics sans pouvoir invoquer systématiquement une atteinte excessive à leur patrimoine financier.