Conseil constitutionnel, Décision n° 2019-790 DC du 1 août 2019

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 31 juillet 2019, la décision n° 2019-790 DC portant sur la loi de transformation de la fonction publique. Les requérants contestent de nombreuses dispositions relatives à la gestion des carrières, au dialogue social, au recrutement des contractuels et à l’exercice du droit de grève. Les faits trouvent leur origine dans l’adoption d’une réforme visant à assouplir le cadre rigide du statut général des fonctionnaires par une gestion modernisée. La procédure législative a conduit à une saisine par soixante députés invoquant la méconnaissance de plusieurs principes à valeur constitutionnelle fondamentaux pour les travailleurs. Le problème juridique principal consiste à déterminer si l’extension du contrat et l’encadrement de la grève respectent les garanties fondamentales accordées aux agents publics. La haute juridiction conclut à la conformité totale du texte sous réserve d’une interprétation respectueuse des principes d’égalité et de continuité du service public. Cette solution consacre une mutation profonde de l’organisation administrative et un encadrement renouvelé des libertés individuelles au nom de l’intérêt général. Cette réforme structurelle s’appuie d’abord sur une redéfinition des modalités de participation et une diversification des profils au sein de l’appareil d’État.

I. La mutation fonctionnelle de l’organisation et du recrutement administratif

A. L’aménagement restrictif du principe de participation des agents

L’instance valide la réduction du rôle des commissions administratives paritaires aux seules décisions individuelles listées par le décret en Conseil d’État. Le juge considère que « le principe de participation concerne la détermination collective des conditions de travail » et non les mesures purement individuelles. Cette interprétation limite la portée du huitième alinéa du Préambule de 1946 pour préserver l’efficacité du pouvoir de direction de l’autorité administrative. La fusion des instances représentatives au sein du comité social respecte également ce droit puisque les représentants participent toujours à la protection de la santé. L’organisation du dialogue social évolue vers une simplification structurelle sans pour autant priver les agents publics des garanties essentielles relatives à leur sécurité professionnelle.

B. La validation constitutionnelle du recours élargi au contrat

La décision autorise l’élargissement des cas de recrutement par contrat pour des emplois de direction ou des fonctions nécessitant une expertise technique très spécialisée. L’instance énonce que « le principe d’égal accès aux emplois publics n’interdit pas au législateur de prévoir que des personnes n’ayant pas la qualité de fonctionnaire puissent être nommées ». Le respect de l’égalité est garanti par une procédure de publicité et une sélection fondée sur les capacités réelles des candidats à remplir leurs missions. Le législateur a défini avec une précision suffisante les catégories d’emplois ouverts aux agents contractuels au regard des exigences posées par l’article trente-quatre. Le statut général des fonctionnaires demeure la règle de principe malgré l’admission de dérogations justifiées par les besoins spécifiques de chaque service public. La flexibilité recherchée dans la gestion des carrières trouve son corollaire dans la limitation de certaines prérogatives collectives au profit de la continuité administrative.

II. La conciliation des libertés des agents avec les nécessités du service

A. L’encadrement législatif légitime du droit de grève local

Le Conseil constitutionnel valide l’encadrement du droit de grève dans certains services publics locaux pour assurer la continuité des activités essentielles aux usagers. La solution repose sur la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels et la sauvegarde de l’intérêt général menacé par les interruptions brutales. Le droit de grève « a des limites » que le législateur peut tracer pour garantir la salubrité publique ou les besoins primordiaux de la population. L’obligation de déclaration préalable imposée quarante-huit heures à l’avance ne constitue pas une entrave disproportionnée à l’exercice d’un droit de valeur constitutionnelle. Cette mesure préventive permet aux autorités locales d’organiser le service minimum indispensable tout en sanctionnant uniquement les manquements aux obligations procédurales de l’agent.

B. L’absence d’atteinte caractérisée à la liberté contractuelle individuelle

Le régime du détachement d’office vers des organismes privés ou publics industriels ne méconnaît pas la liberté contractuelle protégée par la Déclaration de 1789. L’instance affirme que « le lien de service entre le fonctionnaire et la personne publique qui l’emploie ne relevant pas d’une relation contractuelle ». Le fonctionnaire peut toujours demander la fin de son détachement pour réintégrer une administration classique de l’État ou des collectivités territoriales compétentes. L’établissement d’un contrat de travail avec l’organisme d’accueil est la conséquence technique nécessaire du transfert d’activité soumis aux règles du droit privé. La décision assure ainsi une transition fluide des personnels lors des restructurations administratives sans sacrifier les droits fondamentaux attachés à la qualité de fonctionnaire.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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