Conseil constitutionnel, Décision n° 2019-795 DC du 20 décembre 2019

Le Conseil constitutionnel, par sa décision numéro deux mille dix-neuf sept cent quatre-vingt-quinze DC du vingt décembre deux mille dix-neuf, se prononce sur le budget social. Plusieurs groupes de parlementaires ont saisi la juridiction pour contester la régularité de la procédure législative ainsi que la conformité au fond de diverses mesures. Ils dénonçaient notamment l’existence de cavaliers sociaux et une rupture d’égalité résultant de la revalorisation différenciée des pensions de retraite selon leur montant. L’examen de cette décision permet d’analyser la protection du domaine des lois de financement avant d’aborder la conciliation entre l’équilibre budgétaire et les principes d’égalité.

**I. L’exigence de régularité dans l’élaboration et le domaine de la loi de financement**

**A. La protection de la clarté et de la sincérité du débat parlementaire**

Les requérants critiquaient la brièveté des délais d’examen et l’introduction tardive d’un amendement du pouvoir exécutif modifiant l’objectif national des dépenses de santé. La juridiction rappelle que « les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d’amendement » conformément aux dispositions de l’article quarante-quatre de la Constitution. Elle estime que les délais retenus pour le dépôt des amendements n’ont pas empêché l’exercice effectif de ce droit par les représentants élus. L’exposé des motifs de l’amendement litigieux informait ainsi suffisamment les élus de sa portée réelle sur les trajectoires financières de la santé publique. Le respect de la procédure législative constitue le premier socle de validité d’une loi dont le contenu doit aussi respecter le domaine social.

**B. La sanction des dispositions étrangères au domaine social**

L’article huit visait à moduler les contributions patronales d’assurance chômage en fonction du recours aux contrats courts par le mécanisme dit du bonus-malus. La juridiction déclare cette disposition contraire à la Constitution car elle est « étrangère au domaine de la loi de financement de la sécurité sociale ». Les juges considèrent que les effets de cette mesure sur les recettes du régime général sont trop indirects pour figurer dans ce texte budgétaire. Cette décision réaffirme la stricte délimitation du domaine organique afin d’éviter que les lois de financement ne servent de support à des réformes structurelles. La protection de la forme s’accompagne d’un examen vigilant de la substance des mesures au regard des libertés et des principes fondamentaux.

**II. La conciliation délicate entre l’équilibre financier et les principes fondamentaux**

**A. La validation sous réserve des mesures de régulation économique**

Le législateur a instauré une contribution sur les dispositifs médicaux dont l’assiette correspond aux montants remboursés par les organismes sociaux aux établissements de soins. Le juge valide ce dispositif sous la réserve que le calcul exclue la majoration de tarif perçue par les établissements lors d’achats à prix réduit. Cette interprétation garantit que l’imposition repose sur des « critères objectifs et rationnels en fonction des buts » poursuivis par le pouvoir législatif. La protection de la santé et l’équilibre financier du système social justifient par ailleurs la possibilité de fixer des prix maximaux de vente pour certains produits. Cette régulation des prix de santé s’accompagne de mesures sur les prestations qui touchent directement le pouvoir d’achat des anciens travailleurs.

**B. Le contrôle restreint de la revalorisation différenciée des pensions**

La loi prévoit une revalorisation limitée à zéro virgule trois pour cent des pensions supérieures à deux mille euros tandis que les plus modestes suivent l’inflation. Les auteurs des saisines dénonçaient une rupture d’égalité devant les charges publiques et une atteinte au caractère contributif du système de retraite par répartition. Le juge constitutionnel écarte ces griefs en soulignant que le dispositif repose sur une différence de traitement en rapport direct avec l’objet de la loi. Il précise néanmoins que cette validation repose sur « son caractère exceptionnel et limité » car une répétition de la mesure modifierait durablement les niveaux relatifs des prestations. Cette décision marque une volonté de protéger le pouvoir d’achat des assurés les plus fragiles tout en préservant la soutenabilité financière du système social.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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