Conseil constitutionnel, Décision n° 2020-806 DC du 7 août 2020

Par une décision rendue le 7 août 2020, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité d’une loi organique relative à la durée des fonctions des membres d’une assemblée consultative. Le texte examiné visait à reporter l’échéance des mandats arrivant à leur terme pour assurer la transition vers un nouveau cadre législatif. Cette saisine, effectuée par le Premier ministre, s’inscrit dans le cadre du contrôle obligatoire des lois organiques avant leur promulgation par le Président de la République. Le litige constitutionnel porte sur la possibilité pour le législateur de prolonger temporairement des mandats électifs ou de nomination au-delà de la durée initialement fixée. La juridiction devait déterminer si une telle prorogation portait atteinte aux principes de fonctionnement régulier des institutions publiques prévus par la Constitution. Les juges ont admis la validité de la mesure en relevant que la modification législative demeurait limitée dans le temps et justifiée par une réforme imminente.

I. La validation d’un report de mandat strictement encadré

A. Le constat de la régularité formelle de la procédure législative

Le Conseil constitutionnel commence son examen par la vérification du respect des règles de présentation et d’adoption de la loi organique soumise à son contrôle. L’article 1er précise que la loi a été prise sur le fondement de l’article 71 de la Constitution relatif à la composition des organismes consultatifs. Le juge relève que les dispositions ont été « adoptées dans le respect des règles de procédure prévues par les trois premiers alinéas » de l’article 46. Cette vérification formelle assure que le législateur n’a pas méconnu les délais de réflexion imposés entre le dépôt du texte et son examen en séance.

La régularité de la procédure garantit ainsi la légitimité démocratique d’une modification touchant à l’organisation d’une institution constitutionnelle dont le rôle demeure essentiel. Par ce contrôle scrupuleux, la juridiction confirme que les prérogatives du Parlement ont été exercées conformément aux exigences supérieures de la charte fondamentale. Cette étape préliminaire permet ensuite d’aborder l’examen du fond de la mesure de prorogation dont les limites temporelles constituent le cœur de l’analyse juridique.

B. L’exigence d’une limitation temporelle à la prolongation exceptionnelle

Le litige portait principalement sur l’article 1er qui prolonge le mandat des membres jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou au plus tard au 1er juin 2021. Le juge constitutionnel observe que ce mandat de cinq ans devait initialement atteindre son terme le 14 novembre 2020 selon les dispositions organiques antérieures. Pour valider cette dérogation, la décision souligne que la prolongation est d’« une courte durée et revêt un caractère exceptionnel et transitoire ». Cette formulation restrictive indique que le législateur ne dispose pas d’un pouvoir discrétionnaire pour modifier la durée des mandats sans motif impérieux.

L’encadrement strict de la période de prorogation permet de concilier la nécessité de la réforme avec le respect de la périodicité normale du renouvellement des instances. Le Conseil s’assure ainsi que le report n’aboutit pas à un maintien indéfini en fonction de titulaires dont la légitimité temporelle serait épuisée. La conformité de l’article 1er repose donc sur la précision de l’échéance finale imposée par le législateur pour l’aboutissement du processus de transformation législative.

II. L’accompagnement constitutionnel de la réforme de l’institution

A. La nécessaire coordination avec l’adoption d’un nouveau cadre organique

La décision s’inscrit dans le contexte d’un projet de loi organique délibéré en conseil des ministres le 7 juillet 2020 visant à réformer l’assemblée consultative. Le juge constitutionnel admet que la prorogation des mandats actuels constitue une mesure de gestion nécessaire pour éviter une vacance ou un renouvellement prématuré. En effet, organiser des nominations selon les anciennes règles juste avant une modification structurelle aurait nui à la cohérence de l’action publique et institutionnelle. La loi organique permet d’aligner la fin des fonctions des membres actuels avec la mise en œuvre effective de la restructuration globale de l’organisme.

Cette approche pragmatique du droit constitutionnel favorise une transition fluide entre deux régimes juridiques successifs sans interrompre l’activité consultative indispensable au Gouvernement et au Parlement. La juridiction reconnaît ici une certaine souplesse au législateur organique pour organiser la succession des normes dans le temps au bénéfice de la continuité. L’objectif de bonne administration de la justice et des institutions justifie alors ce décalage temporel entre le droit en vigueur et le droit futur.

B. La préservation de la continuité fonctionnelle de l’assemblée consultative

L’examen se termine par la validation de l’article 2 qui modifie l’intitulé de l’ordonnance de 1958 relative à l’institution consultative pour refléter ses missions actuelles. Le Conseil constitutionnel juge cette disposition purement formelle conforme à la Constitution sans soulever d’objection particulière quant à sa portée juridique ou symbolique. La validation globale du texte assure que l’assemblée pourra continuer de siéger et de rendre ses avis durant la période de transition législative ainsi aménagée. La décision garantit que le fonctionnement de l’État n’est pas entravé par les délais inhérents au travail parlementaire nécessaire à l’adoption des réformes structurelles.

En déclarant la loi conforme, le juge constitutionnel remplit sa mission de régulateur des institutions en veillant à la stabilité du cadre organique de la République. Cette solution confirme une jurisprudence établie selon laquelle les mesures transitoires sont valables dès lors qu’elles ne dénaturent pas durablement les règles de fonctionnement constitutionnel. L’équilibre ainsi maintenu entre rigueur juridique et nécessités politiques permet l’évolution sereine des structures administratives et consultatives de l’État sous le contrôle vigilant de la Constitution.

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Hassan KOHEN
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