Conseil constitutionnel, Décision n° 2020-843 QPC du 28 mai 2020

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 28 mai 2020, une décision capitale relative à la conformité de l’article L. 311-5 du code de l’énergie aux droits constitutionnels. Une association contestait l’absence de participation du public lors de la délivrance des autorisations d’exploiter des installations de production d’électricité sur le territoire national. Saisi par le Conseil d’État le 4 mars 2020, le juge constitutionnel devait examiner si le législateur avait méconnu sa compétence au regard de la protection environnementale. La question prioritaire de constitutionnalité portait sur les modalités de délivrance de ces autorisations par l’autorité administrative sans consultation préalable des citoyens concernés. Les requérants soutenaient que ces décisions avaient une incidence directe sur l’environnement et devaient respecter les exigences posées par la Charte de l’environnement. Le Conseil constitutionnel affirme que ces décisions constituent des actes ayant une incidence environnementale au sens de l’article 7 de la norme constitutionnelle précitée. L’analyse de cette décision suppose d’étudier la qualification environnementale des autorisations de production avant d’examiner la régularisation temporelle opérée par le juge constitutionnel.

I. La qualification environnementale de l’autorisation d’exploiter une installation électrique

A. L’identification d’une décision publique ayant une incidence sur l’environnement Le juge constitutionnel souligne que l’autorisation administrative d’exploiter tient compte du choix des sites, de l’occupation des sols et de l’utilisation du domaine public. Il en conclut que la décision « constitue une décision publique ayant une incidence sur l’environnement au sens de l’article 7 de la Charte de l’environnement ». Cette qualification est indépendante de la circonstance que d’autres actes administratifs complémentaires puissent être adoptés ultérieurement pour permettre l’implantation effective de l’installation. Le Conseil adopte ainsi une vision large et concrète des décisions publiques susceptibles d’affecter les écosystèmes ou les ressources naturelles du pays. Il précise que l’autorisation désigne non seulement le titulaire mais également le mode de production, la capacité autorisée et le lieu d’implantation choisi.

B. Le constat d’une carence législative initiale au regard de la Charte de l’environnement Avant l’intervention d’une ordonnance en 2013, aucune disposition législative n’assurait la mise en œuvre du principe de participation du public pour ces décisions spécifiques. Le Conseil constitutionnel relève que « le législateur a méconnu, pendant cette période, les exigences de l’article 7 de la Charte de l’environnement » garantissant ce droit. Cette méconnaissance de compétence affecte directement un droit fondamental puisque la participation constitue une condition de validité des décisions ayant un impact environnemental notable. L’absence de dispositif permettant au public de déposer des observations ou d’accéder aux informations relatives au projet rendait le texte initialement inconstitutionnel. La reconnaissance du caractère environnemental de l’autorisation permet au juge de confronter les dispositions contestées aux évolutions législatives ayant renforcé la participation citoyenne.

II. Une régularisation législative pérenne tempérée par la préservation de la sécurité juridique

A. La validation des procédures de participation électronique issues de l’ordonnance de 2013 L’ordonnance du 5 août 2013 a introduit dans le code de l’environnement un article prévoyant la mise à disposition du public par voie électronique des projets. Le Conseil constitutionnel estime que cette procédure « répond aux exigences d’accès du public aux informations relatives à l’environnement et de participation à l’élaboration des décisions ». Bien que l’ordonnance n’ait pas fait l’objet d’une ratification expresse par le Parlement, ses dispositions ont acquis une valeur législative incontestable. Le juge constitutionnel considère que les conditions et limites de la participation sont désormais définies par la loi au sens de la Charte de l’environnement. À compter du 1er septembre 2013, les dispositions contestées du code de l’énergie ne méconnaissaient donc plus les principes constitutionnels de participation des citoyens.

B. L’aménagement des effets de l’inconstitutionnalité pour éviter des conséquences excessives Le Conseil décide que la remise en cause des mesures prises avant septembre 2013 sur ce fondement « aurait des conséquences manifestement excessives » pour la société. Il fait usage de son pouvoir de modulation dans le temps pour protéger la sécurité juridique des exploitants et la stabilité des autorisations déjà délivrées. Cette déclaration d’inconstitutionnalité ne peut donc pas être invoquée pour contester la légalité des actes administratifs individuels adoptés durant la période de méconnaissance. Le juge privilégie la continuité des services de production d’électricité malgré la violation constatée des droits garantis par la Charte de l’environnement en 2011. La décision illustre ainsi la volonté du Conseil de concilier la protection des libertés publiques avec les impératifs de stabilité des situations juridiques acquises.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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