Conseil constitutionnel, Décision n° 2020-867 QPC du 27 novembre 2020

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 27 novembre 2020, une décision portant sur la conformité de l’article L. 6361-12 du code des transports. Cette disposition législative autorise le prononcé d’amendes administratives en cas de non-respect des restrictions environnementales fixées sur les aérodromes français. Le Conseil d’État a transmis cette question prioritaire de constitutionnalité par une décision du 25 septembre 2020 afin d’examiner une éventuelle atteinte aux libertés. Le requérant estimait que la loi permettait de sanctionner injustement des personnes pour des manquements commis par les seuls équipages techniques. Le grief principal reposait sur la méconnaissance du principe selon lequel nul ne peut être punissable que de son propre fait. Les juges constitutionnels ont toutefois écarté cette argumentation en déclarant les dispositions contestées pleinement conformes aux exigences de la Constitution.

I. L’affirmation du principe de personnalité des sanctions administratives

A. Le fondement constitutionnel de la responsabilité individuelle Le Conseil rappelle que le principe de personnalité des peines découle des articles 8 et 9 de la Déclaration des droits de l’homme. Cette protection garantit que « nul n’est punissable que de son propre fait », règle applicable à toute sanction ayant le caractère d’une punition. Le juge s’assure ainsi que la répression administrative ne frappe pas un individu pour une faute commise par une tierce personne physique. La décision souligne la nécessité d’établir un lien direct entre le comportement de l’auteur présumé et le manquement constaté par l’autorité. Cette exigence constitutionnelle fait obstacle à toute forme de responsabilité collective ou automatique au sein des procédures de police administrative spéciale.

B. La désignation des assujettis aux amendes environnementales L’article contesté énumère quatre catégories de personnes participant à l’activité aérienne, dont les transporteurs publics et les fréteurs de l’aviation civile. Les juges précisent que ces dispositions « se bornent à énumérer des personnes participant à l’activité aérienne » susceptibles de commettre des infractions. Cette liste permet de définir les débiteurs des obligations de calme sonore sans instaurer pour autant une présomption de culpabilité irréfragable. La loi identifie ainsi les acteurs économiques directement impliqués dans l’exploitation des aéronefs sur les plateformes aéroportuaires soumises à une réglementation. L’identification des responsables constitue le préalable indispensable à l’exercice effectif du pouvoir de sanction par l’autorité de contrôle des nuisances.

II. L’exclusion d’une responsabilité automatique pour le fait d’autrui

A. L’absence d’imputabilité indue au regard de la lettre du texte Le requérant soutenait que les transporteurs ne disposaient pas de la maîtrise effective de l’aéronef lors des phases de décollage ou d’atterrissage. Le Conseil répond que les textes n’ont pas pour effet de « rendre une personne responsable d’un manquement qui ne lui serait pas imputable ». Cette interprétation stricte neutralise la crainte d’une responsabilité pour le fait d’autrui qui pèserait indûment sur les propriétaires ou les exploitants. La haute juridiction considère que le grief « manque en fait » car la lettre de la loi n’établit aucune solidarité répressive illégitime. La sanction administrative reste attachée au non-respect de prescriptions techniques dont la surveillance finale incombe normalement à l’entité titulaire de l’activité.

B. L’efficacité du pouvoir de sanction de l’autorité aéroportuaire La décision confirme la validité du régime répressif tout en écartant le principe d’égalité devant les charges publiques jugé inopérant en l’espèce. En validant l’amende administrative, le Conseil assure l’efficacité des mesures de protection de l’environnement sonore aux abords des grands aéroports nationaux. La portée de cet arrêt réside dans la reconnaissance d’un large pouvoir d’appréciation du législateur pour organiser la police des activités complexes. Dès lors, la conformité de l’article L. 6361-12 permet de maintenir un haut niveau d’exigence environnementale sans sacrifier les droits de la défense. Cette solution sécurise le cadre légal du transport aérien tout en rappelant les garde-fous nécessaires à la protection des libertés fondamentales.

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Hassan KOHEN
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