Conseil constitutionnel, Décision n° 2021-826 DC du 21 octobre 2021

Le Conseil constitutionnel a rendu le 21 octobre 2021 une décision relative à la régulation et à la protection des œuvres culturelles à l’ère numérique. La loi déférée modifie le régime des sanctions pécuniaires applicables aux éditeurs de services audiovisuels manquant à leurs obligations de contribution financière. Les requérants soutiennent que le nouveau plafond des peines méconnaît le principe de proportionnalité garanti par l’article 8 de la Déclaration de 1789. Ils contestent spécifiquement l’assiette de la sanction et les taux maximaux retenus par le législateur qu’ils jugent manifestement excessifs.

La question posée au juge constitutionnel porte sur la conformité de l’aggravation des peines pécuniaires au regard des exigences de nécessité des délits. Le Conseil valide le relèvement du plafond à hauteur du double de l’obligation mais censure la majoration prévue en cas de récidive. Cette décision conduit à examiner d’abord la légitimité du renforcement de la sanction pécuniaire puis l’encadrement strict du pouvoir répressif et procédural.

I. La validation du renforcement de la sanction pécuniaire

A. La poursuite d’un objectif d’intérêt général culturel

Le juge constitutionnel rappelle que la contribution des éditeurs concourt au financement de l’industrie cinématographique et à la production de contenus de qualité. Cette obligation répond directement à un objectif d’intérêt général attaché à la promotion de la création culturelle française et européenne. Le législateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour définir les peines qu’il estime nécessaires afin d’assurer l’efficacité de cette politique publique. La juridiction souligne ainsi que « la répression du manquement à cette obligation répond à l’objectif d’intérêt général qui s’attache à la promotion de la création ».

B. L’adéquation de la sanction à la nature de l’infraction

Le Conseil estime que la sanction pécuniaire, proportionnelle au montant de la contribution annuelle, présente une nature liée à celle de l’infraction commise. Le montant maximal fixé au double de l’obligation annuelle ne constitue qu’un plafond que le régulateur doit adapter selon la gravité des faits. L’autorité administrative doit prendre en compte les avantages tirés du manquement pour déterminer le montant exact de la somme due par l’éditeur. Le juge constitutionnel précise que « cette sanction est prononcée sous le plein contrôle du juge », garantissant ainsi le respect des droits fondamentaux.

Toutefois, la validation du principe de la sanction n’exonère pas le législateur de définir précisément les conditions de mise en œuvre de l’aggravation.

II. La sanction du défaut d’encadrement des prérogatives législatives

A. L’invalidité d’un régime de récidive insuffisamment défini

Le législateur avait prévu que le montant maximal de la peine puisse atteindre le triple du montant de l’obligation en cas de récidive. Le Conseil constitutionnel censure cette disposition car la loi ne définit pas les conditions, notamment de délai, dans lesquelles cette récidive est constatée. L’absence de cadre temporel ou matériel pour caractériser la réitération du manquement confère à la sanction un caractère manifestement disproportionné au regard de l’infraction. La décision affirme que « le législateur a retenu une sanction manifestement disproportionnée » en omettant de préciser les modalités d’application de cette circonstance aggravante.

B. La répression procédurale des cavaliers législatifs

La juridiction exerce également un contrôle d’office sur la régularité de la procédure d’adoption de plusieurs articles insérés par voie d’amendement. Elle constate que les dispositions relatives aux normes des téléviseurs ou aux décrochages régionaux ne présentent aucun lien avec le projet de loi initial. Ces cavaliers législatifs sont déclarés contraires à la Constitution pour méconnaissance des exigences de l’article 45 relatives à la recevabilité des amendements. Le juge constitutionnel protège ainsi la cohérence du débat parlementaire en écartant les mesures étrangères à l’objet principal du texte soumis à son examen.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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