Conseil constitutionnel, Décision n° 2022-5783 AN du 20 janvier 2023

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 janvier 2023, une décision relative au contentieux de l’élection d’un député au sein d’une circonscription législative. Un candidat malheureux sollicitait l’annulation des opérations électorales en invoquant de nombreux griefs portant sur la validité des bulletins, la tenue des listes et la sincérité des émargements. Après l’examen des pièces et des griefs, le juge électoral a procédé à des rectifications arithmétiques sans pour autant inverser le résultat final du scrutin. La question centrale résidait dans l’influence de diverses irrégularités formelles sur la sincérité globale du scrutin et la validité juridique de la désignation du représentant national. Le juge a rejeté la requête après avoir précisé les conditions de validité des suffrages et rappelé la force probante du procès-verbal de chaque bureau de vote. Il convient d’analyser la validation technique des bulletins de vote avant d’envisager le contrôle rigoureux de l’émargement et ses conséquences sur l’issue du scrutin électoral.

I. La validation technique des suffrages et la primauté des actes authentiques

A. La souplesse de l’appréciation matérielle des bulletins Le Conseil constitutionnel rappelle que « les bulletins multiples ne comptent que pour un seul quand ils désignent la même liste » ou le même candidat député. Il censure l’erreur d’un bureau de vote ayant invalidé une enveloppe contenant deux bulletins identiques, ajoutant ainsi une voix au candidat injustement lésé par cette décision. L’appréciation de l’intégrité physique des bulletins s’avère libérale puisque le juge considère qu’un exemplaire « légèrement déchiré » demeure valable s’il ne porte aucun signe de reconnaissance. Des taches d’encre sont également regardées « comme d’origine purement accidentelle » et ne sauraient entraîner la nullité du suffrage dès lors que l’anonymat du votant reste préservé.

B. La force probante attachée aux mentions du procès-verbal Le juge électoral consacre la primauté des mentions portées sur le procès-verbal signé par les membres du bureau sur les simples feuilles de pointage parfois contradictoires. En présence de résultats divergents entre deux documents, il y a lieu de retenir les chiffres officiels revêtus de la signature de la présidente et des assesseurs. Cette solution garantit la sécurité juridique des opérations électorales en évitant que des erreurs matérielles sur des documents de travail ne remettent en cause l’acte authentique. La simple existence d’un double de la liste électorale ne suffit pas à établir une pression illicite, déplaçant ainsi le débat vers la régularité formelle des émargements.

II. L’encadrement strict de l’émargement et la préservation du résultat électoral

A. La protection de la sincérité du vote par la signature L’article L. 62-1 du code électoral dispose que « le vote de chaque électeur est constaté par sa signature apposée à l’encre en face de son nom ». Le Conseil souligne que cette formalité essentielle est « destinée à assurer la sincérité des opérations électorales » en apportant la preuve irréfutable de la participation personnelle. Si des différences de paraphe sont parfois justifiées par l’usage d’un nom marital, six votes sont néanmoins annulés en raison de divergences de signatures significatives. Le juge sanctionne le défaut d’explication probante concernant ces émargements irréguliers avant d’évaluer l’impact arithmétique de ces annulations sur le résultat définitif de l’élection contestée.

B. Le maintien de l’issue du scrutin malgré les rectifications opérées Le Conseil constitutionnel procède à l’ajout de deux voix pour le requérant et retire six suffrages au candidat élu en raison des irrégularités matérielles constatées. Ces rectifications comptables n’ont pas eu pour effet de modifier l’ordre des candidats car l’avance du député proclamé reste supérieure au nombre de voix annulées. Le juge électoral refuse d’annuler une élection lorsque les irrégularités constatées, bien que réelles, n’ont pas été en mesure d’inverser le sens du verdict populaire exprimé. La stabilité du mandat législatif est ainsi préservée contre des recours qui, tout en soulevant des points de droit valides, ne démontrent pas une altération décisive.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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