Le Conseil constitutionnel, par une décision du 15 juin 2023, se prononce sur le respect des obligations financières des candidats aux élections législatives. Un candidat ayant obtenu plus de 1 % des suffrages lors du scrutin de juin 2022 a déposé tardivement son compte de campagne. L’autorité administrative de contrôle a saisi le juge constitutionnel pour faire constater cette irrégularité manifeste au regard des prescriptions du code électoral. L’intéressé soutenait avoir été induit en erreur par un professionnel sur l’obligation réelle de procéder au dépôt de ses documents financiers. La question posée est de savoir si le dépôt hors délai d’un compte de campagne justifie une déclaration d’inéligibilité malgré une erreur de conseil. Les juges retiennent que la méconnaissance des délais prescrits constitue un manquement grave justifiant le prononcé d’une inéligibilité d’une durée d’une année. Cette solution conduit à analyser la caractérisation du manquement aux obligations de dépôt avant d’étudier la sévérité de la sanction retenue par les juges.
**I. La caractérisation du manquement aux obligations de dépôt**
Le Conseil constitutionnel rappelle que tout candidat obtenant au moins 1 % des suffrages exprimés est tenu d’établir un compte de campagne.
**A. La rigueur du cadre temporel imposé par le Code électoral**
L’article L. 52-12 dispose que le compte retrace « l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées ». Ce document doit être déposé « au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin » auprès de l’autorité compétente. La juridiction veille ainsi à la transparence financière et à la sincérité des opérations électorales lors de chaque renouvellement de l’Assemblée nationale. Cette obligation de dépôt s’impose de manière impérative dès lors que les seuils de suffrages ou de dons sont effectivement atteints par l’intéressé.
**B. La constatation matérielle d’une méconnaissance des délais**
Le délai légal de dépôt pour le scrutin contesté expirait impérativement le 19 août 2022 à dix-huit heures précises pour l’ensemble des candidats. Le candidat a déposé son dossier comptable le 30 septembre 2022, soit « après l’expiration de ce délai » de manière certaine et incontestable. Le manquement à la prescription légale est donc établi par le simple constat de la date tardive de la transmission du document administratif. Une fois le manquement matériellement établi, le Conseil constitutionnel doit apprécier si les justifications apportées peuvent atténuer la responsabilité du candidat sanctionné.
**II. La sévérité de la sanction en l’absence de justification valable**
Le Conseil constitutionnel possède un pouvoir d’appréciation concernant la gravité des manquements constatés lors de l’examen de la régularité des comptes de campagne.
**A. L’inefficacité des arguments tirés d’une erreur de conseil**
Le requérant affirmait avoir été « induit en erreur sur la nécessité de déposer un compte de campagne » par les indications d’un expert-comptable. Il prétendait que cette information erronée expliquerait le dépôt tardif réalisé seulement après une alerte de la commission nationale chargée du contrôle. Le juge écarte cet argument en soulignant qu’il ne résulte pas de l’instruction qu’une « circonstance particulière » puisse justifier une telle méconnaissance. La responsabilité personnelle du candidat sur la régularité de son financement interdit de se prévaloir utilement de la négligence d’un tiers.
**B. Le prononcé d’une inéligibilité proportionnée à la méconnaissance du droit**
En application de l’article L.O. 136-1, le manquement aux règles de financement permet de déclarer le candidat inéligible pour une durée déterminée. Le Conseil décide de « prononcer l’inéligibilité […] à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision ». Cette sanction prive l’intéressé de la possibilité de se présenter à de nouveaux suffrages afin de punir la violation des règles financières. Le respect strict des calendriers de dépôt garantit l’égalité entre tous les prétendants à la représentation nationale lors des diverses élections législatives.