Le Conseil constitutionnel, par une décision du 30 mars 2023, a statué sur les conséquences du défaut de présentation professionnelle d’un compte de campagne. Un candidat aux élections législatives de juin 2022 dans la huitième circonscription d’Ille-et-Vilaine a recueilli plus de un pour cent des suffrages exprimés. Son document comptable présentait des recettes et des dépenses supérieures au seuil de quatre mille euros sans être certifié par un expert-comptable. L’autorité de contrôle a saisi le juge constitutionnel le 14 décembre 2022 après avoir constaté cette irrégularité dans sa propre décision du 5 décembre. Le candidat n’a pas produit d’observations au cours de l’instruction malgré la communication de la saisine effectuée par le secrétariat de la juridiction. La question posée concerne la possibilité de déclarer inéligible un candidat ayant méconnu les formes impératives du dépôt de ses comptes de financement. Le juge relève qu’aucune circonstance particulière ne justifiait la méconnaissance des obligations résultant du code électoral avant de prononcer une inéligibilité d’un an. La rigueur de l’obligation de présentation comptable précède ainsi l’analyse de la dimension répressive attachée à la méconnaissance volontaire ou non de la règle.
**I. L’affirmation du respect rigoureux des obligations comptables électorales**
**A. L’exigence de la certification par un expert-comptable**
Aux termes de l’article L. 52-12 du code électoral, tout candidat aux élections législatives doit établir un compte de campagne retraçant l’ensemble de ses recettes. Ce document doit impérativement être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables pour assurer la sincérité des pièces justificatives et l’équilibre financier. Cette formalité n’est facultative que si le candidat obtient moins de cinq pour cent des voix et dispose de ressources limitées sous un décret. En l’espèce, le candidat avait engagé des dépenses excédant le montant de quatre mille euros fixé par les dispositions réglementaires applicables à ce scrutin. Le défaut de recours à un professionnel du chiffre constitue une violation frontale d’une règle de forme destinée à faciliter le contrôle des deniers.
**B. La caractérisation d’un manquement de particulière gravité**
L’article L.O. 136-1 dispose que le juge peut déclarer inéligible le candidat n’ayant pas déposé son compte selon les conditions et les délais prescrits. Cette sanction s’applique en cas de volonté de fraude ou de « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales » selon les termes. La juridiction souveraine souligne qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations » précitées. Cette appréciation stricte démontre que l’absence de certification professionnelle prive l’administration de garanties essentielles pour vérifier l’origine et la destination des fonds électoraux. Une telle omission justifie par conséquent l’application immédiate d’une mesure restrictive aux droits politiques du candidat fautif pour la durée prévue.
**II. La sanction de l’irrégularité financière et sa portée répressive**
**A. Le prononcé d’une inéligibilité à caractère punitif**
La décision prononce l’inéligibilité du candidat à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la date du prononcé du présent arrêt. Cette mesure frappe lourdement l’intéressé car elle empêche toute participation à des scrutins futurs durant cette période déterminée par le juge de l’élection. La sanction ne nécessite pas la preuve d’une intention frauduleuse mais repose sur le seul constat matériel de la violation d’une prescription légale. Le Conseil constitutionnel veille à ce que l’égalité entre les candidats soit préservée par le respect scrupuleux des plafonds et des procédures comptables. Cette fermeté garantit que la compétition électorale ne soit pas faussée par une gestion financière occulte ou simplement négligente au regard des principes fondamentaux.
**B. Une rigueur jurisprudentielle au service de la transparence**
La solution retenue s’inscrit dans une ligne jurisprudentielle constante où le défaut de présentation par un expert-comptable est systématiquement sanctionné par l’inéligibilité. Le contrôle de la transparence financière exige une certification technique indépendante pour valider la réalité des mouvements bancaires opérés durant la période de la campagne. Les candidats ne peuvent invoquer leur ignorance ou leur bonne foi pour s’extraire d’une obligation dont la clarté ne souffre aucune interprétation divergente. Cette rigueur assure la protection de l’ordre public électoral et renforce la confiance des citoyens dans la probité des élus de la nation française. La décision participe ainsi à la moralisation de la vie publique en imposant une discipline comptable stricte à l’ensemble des acteurs du débat démocratique.