Le Conseil constitutionnel a rendu, le 20 avril 2023, une décision relative au contentieux du financement des élections législatives tenues dans une circonscription départementale. Un candidat a vu son compte de campagne rejeté par l’autorité administrative compétente le 19 décembre 2022 pour violation des prescriptions du code électoral. Saisi le 13 janvier 2023, le juge constitutionnel doit déterminer si l’absence de compte bancaire spécifique constitue un manquement justifiant une déclaration d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet du compte et prononce une inéligibilité d’un an en raison de la particulière gravité de l’omission constatée. L’étude de cette décision impose d’analyser la rigueur des obligations comptables du candidat avant d’examiner la sévérité de la sanction prononcée par le juge.
I. L’affirmation de la rigueur des obligations comptables du candidat
A. Le caractère substantiel de l’ouverture d’un compte bancaire unique
Le juge rappelle que « l’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations ». Cette obligation garantit la transparence financière en permettant une traçabilité complète de l’ensemble des opérations monétaires engagées durant la période électorale légale. L’absence de ce support bancaire spécifique empêche l’autorité de contrôle de vérifier avec certitude la réalité et l’origine des fonds utilisés pour la propagande. La règle vise à prévenir tout financement occulte en centralisant les flux financiers sous la responsabilité d’un mandataire dument désigné par le candidat.
B. La validation du rejet du compte de campagne
Le non-respect de cette formalité substantielle entraîne mécaniquement le rejet du bilan comptable, car l’intéressé n’a pas satisfait aux exigences de l’article L. 52-6. Le Conseil constitutionnel souligne que « cette circonstance est établie » et valide ainsi la décision initiale prise par l’organe de vérification des comptes de campagne. La méconnaissance d’une règle aussi fondamentale du droit électoral prive le document de sa force probante et justifie une sanction administrative immédiate. Cette solution prétorienne assure l’effectivité du contrôle exercé sur les dépenses électorales afin de préserver l’égalité de traitement entre tous les prétendants.
II. La mise en œuvre d’une sanction d’inéligibilité pour manquement grave
A. La qualification juridique d’un manquement d’une particulière gravité
L’article L.O. 136-1 prévoit qu’en cas de « manquement d’une particulière gravité », le juge peut déclarer inéligible le candidat dont le compte est rejeté à bon droit. Le magistrat estime ici que l’absence totale de compte bancaire dédié revêt un caractère de gravité justifiant pleinement l’application de cette mesure de retrait. La protection de la sincérité du scrutin et la transparence des financements imposent une discipline stricte dont la violation caractérisée altère nécessairement l’ordre public. Le juge exerce son pouvoir d’appréciation pour sanctionner l’omission d’une formalité qui constitue le pivot du système de contrôle des dépenses de campagne.
B. L’exigence de preuve concernant les obstacles bancaires invoqués
L’intéressé invoquait pour sa défense des refus de plusieurs établissements de crédit, sans toutefois apporter le moindre élément de nature à établir la réalité de ses allégations. Le juge constitutionnel refuse de prendre en compte de simples affirmations dépourvues de justificatifs précis pour écarter la responsabilité personnelle du candidat défaillant dans ses obligations. Il prononce par conséquent une inéligibilité pour une durée d’un an, sanctionnant ainsi un manquement que rien ne vient légitimement excuser ou atténuer durant l’instance. Cette décision renforce l’impératif de diligence qui pèse sur chaque citoyen se présentant devant le suffrage universel pour solliciter un mandat législatif.