Conseil constitutionnel, Décision n° 2023-6138 AN du 12 mai 2023

    Le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2023-6138 AN rendue le 11 mai 2023, s’est prononcé sur l’inéligibilité d’une candidate aux élections législatives. Une candidate s’est présentée aux élections des 12 et 19 juin 2022 dans la cinquième circonscription du département du Val-d’Oise pour l’Assemblée nationale. Le compte de campagne devait être déposé au plus tard le 19 août 2022 avant 18 heures auprès de l’autorité de contrôle compétente. La candidate a transmis son dossier le 22 août 2022, soit trois jours après l’expiration du délai légal imparti par le code électoral. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte et saisi le Conseil constitutionnel le 8 février 2023. La requérante invoquait des problèmes de santé pour justifier ce retard mais ne produisait pas de preuves suffisantes pour attester de cette impossibilité. Le juge constitutionnel devait déterminer si le non-respect du délai de dépôt constitue un manquement justifiant le prononcé d’une peine d’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet du compte et déclare l’intéressée inéligible pour une durée d’un an à compter de sa décision. L’étude de cette décision impose d’examiner la rigueur du calendrier électoral avant d’analyser la portée de la sanction prononcée par le juge.

I. La rigueur impérative du calendrier de dépôt des comptes de campagne

A. Une obligation légale de ponctualité strictement encadrée

    L’article L. 52-12 du code électoral impose que « chaque candidat aux élections législatives (…) est tenu d’établir un compte de campagne » s’il remplit certaines conditions. Cette obligation de transparence financière assure l’égalité entre les candidats et permet un contrôle efficace des dépenses engagées durant la période électorale. Le délai de dépôt expire le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, fixant ici la date limite au 19 août 2022. Le Conseil constitutionnel rappelle que le respect de ce délai constitue une formalité substantielle dont la méconnaissance entraîne mécaniquement le rejet du compte.

B. L’insuffisance des justifications liées à l’état de santé

    La candidate tentait de justifier son retard par des problèmes de santé rencontrés durant la période de finalisation de ses documents comptables. Le juge constitutionnel écarte cet argument au motif que l’intéressée « ne démontre pas que ces circonstances auraient été de nature à justifier son retard ». La jurisprudence exige généralement la preuve d’un cas de force majeure ou d’une impossibilité absolue pour déroger aux délais légaux. Le caractère tardif du dépôt est donc confirmé, validant ainsi la décision de rejet initialement prise par la commission de contrôle des comptes. Le constat de cette irrégularité formelle conduit le juge constitutionnel à statuer sur l’éligibilité de la candidate défaillante.

II. La mise en œuvre de la sanction d’inéligibilité pour manquement grave

A. La qualification juridique du défaut de dépôt dans les délais

    L’article L.O. 136-1 dispose que le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat n’ayant pas respecté les délais prescrits par la loi. Le juge considère que « compte tenu de la gravité de ce manquement », il y a lieu de prononcer une sanction privant l’intéressée de ses droits. Cette qualification souligne que le non-respect des règles de financement n’est pas une simple erreur administrative mais une atteinte à l’ordre public électoral. La méconnaissance des délais de dépôt empêche le contrôle de la sincérité des comptes par l’autorité administrative compétente dans les temps impartis.

B. Une sanction proportionnée aux exigences de la probité électorale

    La décision prononce l’inéligibilité de la candidate à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la date du délibéré. Cette durée correspond au pouvoir de modulation du juge constitutionnel qui doit concilier la sévérité nécessaire et la protection du droit au suffrage. Le Conseil constitutionnel assure par cette fermeté le respect effectif des mécanismes de plafonnement et de transparence des financements de la vie politique. Cette solution garantit la probité des candidats aux élections législatives et la sincérité du scrutin par un contrôle rigoureux des dépenses de campagne.

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Hassan KOHEN
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