Conseil constitutionnel, Décision n° 2023-6188 AN du 16 juin 2023

Le Conseil constitutionnel, par une décision du 16 juin 2023, s’est prononcé sur la régularité du compte de campagne d’une candidate aux élections législatives de juin 2022. Un litige est né du rejet de ce compte par l’autorité administrative de contrôle des comptes de campagne le 1er février 2023. La candidate a obtenu plus de un pour cent des suffrages et devait ainsi soumettre un compte équilibré retraçant l’intégralité des dépenses engagées. L’autorité administrative a saisi le juge constitutionnel car le compte présentait un dépassement du plafond électoral ainsi que des dons excessifs provenant d’un particulier. Le problème juridique porte sur la qualification des manquements financiers et sur la nécessité de prononcer une inéligibilité au regard de la gravité des faits. Le juge valide le rejet du compte et déclare la candidate inéligible à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la décision. L’analyse portera sur la caractérisation des manquements aux règles de financement avant d’étudier le prononcé d’une inéligibilité pour manquement d’une particulière gravité.

I. La caractérisation de manquements cumulés aux règles de financement électoral

A. Le dépassement du plafond légal des dépenses autorisées

Le compte de campagne présente un montant de dépenses électorales s’établissant à soixante et onze mille huit cent quatre-vingt-quatorze euros dans la circonscription ultra-marine concernée. Le plafond légal pour ce scrutin était fixé à soixante-huit mille six cent vingt-sept euros pour les élections qui se sont déroulées en juin 2022. Le dépassement s’élève ainsi à trois mille deux cent trente-sept euros, ce qui représente environ quatre virgule sept pour cent du plafond autorisé par le droit. Cette violation des dispositions électorales s’accompagne d’une irrégularité concernant l’origine des fonds perçus par la candidate pour financer sa propre campagne électorale.

B. L’irrégularité relative au plafond des dons des personnes physiques

La juridiction relève également que la candidate a bénéficié de dons d’une même personne physique pour un montant total s’élevant à sept mille huit cents euros. Ce montant excède largement le plafond de quatre mille six cents euros fixé par le premier alinéa de l’article L. 52-8 du code électoral national. La candidate contestait la valorisation de la mise à disposition gratuite de trois véhicules utilitaires consentie par ce donateur particulier durant la période de la campagne. L’accumulation de ces infractions justifie la décision de rejet du compte de campagne et ouvre la voie au prononcé d’une sanction d’inéligibilité.

II. Le prononcé d’une inéligibilité pour manquement d’une particulière gravité

A. La validation du rejet du compte de campagne par le juge

Le juge affirme que « c’est à bon droit que l’autorité administrative de contrôle a rejeté le compte de campagne » de la candidate au mandat national. Cette validation repose sur le cumul des irrégularités constatées tant sur le dépassement du plafond des dépenses que sur l’encaissement de dons de personnes physiques. La décision souligne l’absence d’éléments probants susceptibles de remettre en cause les montants initialement inscrits dans le compte par le mandataire financier concerné. Le constat de ces manquements substantiels conduit la juridiction constitutionnelle à apprécier la gravité des faits pour déterminer la durée de l’inéligibilité requise.

B. La proportionnalité de la sanction d’inéligibilité de trois ans

Le Conseil constitutionnel prononce une inéligibilité de trois ans en raison du « caractère substantiel des obligations méconnues » par la candidate lors de la procédure. Cette sanction s’applique car la candidate ne pouvait ignorer la portée de ces règles impératives destinées à garantir la transparence du financement de la vie politique. La sévérité de la mesure découle de la volonté de sanctionner un manquement d’une particulière gravité aux règles fondamentales du code électoral actuellement en vigueur.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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