Conseil constitutionnel, Décision n° 2023-6197 AN du 30 juin 2023

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 30 juin 2023, une décision relative au contentieux des élections législatives organisées dans la neuvième circonscription du Pas-de-Calais. Un candidat aux scrutins des 12 et 19 juin 2022 a omis d’intégrer une dépense de communication payée par son parti investi dans ses comptes. L’autorité de contrôle a rejeté ce compte de campagne par une décision rendue le 9 février 2023 pour défaut de description exacte des dépenses. Saisi par cette institution, le juge constitutionnel doit déterminer si ce manquement financier justifie une déclaration d’inéligibilité à l’encontre du candidat concerné. Le Conseil constitutionnel confirme le bien-fondé du rejet du compte, tout en refusant de prononcer une sanction d’inéligibilité contre le demandeur. L’analyse portera d’abord sur la méconnaissance des règles comptables avant d’examiner l’appréciation de la gravité du manquement par la haute juridiction.

I. L’irrégularité caractérisée du compte de campagne

A. L’exigence de sincérité et d’exhaustivité comptable L’article L. 52-12 du code électoral dispose que le compte retrace l’ensemble des recettes perçues et l’ensemble des dépenses engagées pour l’élection du candidat. Le candidat doit inclure les avantages directs ou indirects ainsi que les prestations de services et les dons en nature dont il a bénéficié. En l’espèce, l’instruction a révélé l’omission d’une prestation de communication évaluée à soixante euros payée par le parti ayant investi l’intéressé. Cette somme constituait un concours en nature qui aurait dû figurer obligatoirement dans les colonnes des recettes et des dépenses du compte déposé.

B. La confirmation jurisprudentielle du rejet administratif Le juge constate que le compte de campagne a été rejeté en raison du « défaut de description exacte de la totalité des dépenses relatives à l’élection ». La haute juridiction affirme que « c’est à bon droit » que la commission nationale a décidé d’écarter la validité de ce document comptable incomplet. Le non-respect de l’obligation de retracer l’intégralité des flux financiers liés à la campagne entraîne nécessairement le rejet du compte par les autorités. Cette rigueur garantit la transparence financière, bien que le juge doive ensuite évaluer si une sanction supplémentaire s’impose au regard de la situation.

II. L’appréciation nuancée de la sanction d’inéligibilité

A. Le critère légal du manquement d’une particulière gravité L’article L.O. 136-1 prévoit l’inéligibilité « en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité » aux règles de financement des campagnes. Le Conseil constitutionnel dispose d’un pouvoir d’appréciation souverain pour moduler la sanction en fonction des circonstances propres à chaque espèce soumise. La jurisprudence exige généralement une intention frauduleuse manifeste ou une méconnaissance substantielle des plafonds de dépenses pour prononcer une telle mesure. Cette disposition législative vise à sanctionner les comportements qui altèrent la sincérité du scrutin ou qui rompent l’équilibre financier entre les candidats.

B. L’indulgence motivée par la modicité de l’omission financière Le juge constitutionnel relève que l’irrégularité commise n’est pas de nature à entraîner le prononcé d’une inéligibilité dans cette affaire précise. La haute juridiction considère que « l’irrégularité commise, pour regrettable qu’elle soit, n’est pas de nature à entraîner le prononcé d’une inéligibilité ». L’omission reste regrettable mais l’absence de gravité particulière permet au candidat de conserver son éligibilité pour les prochains scrutins. Cette décision illustre une application proportionnée du droit électoral qui distingue l’erreur comptable vénielle de la fraude délibérée aux règles de financement.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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