Conseil constitutionnel, Décision n° 2023-6259 AN du 30 juin 2023

Le Conseil constitutionnel, par une décision du 29 juin 2023, examine le respect des règles de financement lors du scrutin législatif organisé dans une circonscription départementale. Un candidat ayant recueilli plus de un pour cent des suffrages n’a pas déposé son compte de campagne malgré l’obligation légale pesant sur sa situation. La commission nationale chargée du contrôle des comptes de campagne saisit le juge constitutionnel afin de tirer les conséquences juridiques de cette carence manifeste. L’intéressé invoque l’envoi des documents sans toutefois produire de justificatifs alors que l’instruction ne révèle aucune circonstance exceptionnelle susceptible de justifier cette méconnaissance des règles. Le litige pose la question de savoir si le défaut de dépôt d’un compte de campagne constitue un manquement suffisant pour fonder une déclaration d’inéligibilité immédiate. Le juge répond par l’affirmative en prononçant une inéligibilité de trois ans après avoir constaté la particulière gravité de l’omission des obligations élémentaires de transparence. L’étude portera d’abord sur la caractérisation du manquement aux obligations comptables avant d’analyser la mise en œuvre de la sanction d’inéligibilité par le juge électoral.

I. La constatation d’un manquement grave aux obligations comptables électorales

A. L’omission du dépôt du compte de campagne dans les délais prescrits

L’article L. 52-12 du code électoral impose aux candidats ayant obtenu au moins un pour cent des suffrages de déposer un compte de campagne en équilibre. Cette obligation légale garantit la transparence des financements politiques en permettant le contrôle effectif des dépenses engagées pour la conquête d’un mandat au suffrage universel. Le Conseil constitutionnel souligne que l’intéressé « n’a pas déposé de compte de campagne alors qu’il y était tenu » à l’expiration du délai imparti par la loi. Le respect du calendrier fixé constitue une formalité dont l’inobservation empêche la commission nationale compétente de vérifier la régularité des recettes et des dépenses présentées.

B. L’absence de justification probante face à l’exigence de transparence

Le juge électoral rejette les arguments de la défense en notant qu’ « il ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières » justifiaient l’absence de dépôt. Le candidat prétend avoir expédié les documents comptables mais le Conseil constitutionnel observe qu’ « il n’apporte aucun élément au soutien de cette allégation » matérielle pourtant nécessaire. L’absence de preuves prive l’argumentaire de toute portée juridique face à la rigueur des délais prévus par les dispositions législatives du code électoral de la République. Cette carence dans l’administration de la preuve renforce le constat de la négligence fautive et justifie l’application d’une sanction rigoureuse par le juge constitutionnel.

II. La sanction de l’inéligibilité comme corollaire de l’ordre public électoral

A. La qualification juridique d’un manquement d’une particulière gravité

L’article L.O. 136-1 prévoit que l’inéligibilité peut être déclarée en présence d’une volonté de fraude ou d’un manquement présentant une particulière gravité pour l’élection. Le Conseil constitutionnel juge que le défaut total de dépôt du compte de campagne revêt une telle intensité au regard des principes fondamentaux régissant le droit électoral. Cette qualification juridique repose sur l’idée que l’absence de reddition de comptes constitue une entrave majeure au contrôle démocratique des sources de financement des campagnes politiques. Le juge retient que « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité » du candidat défaillant pour protéger le scrutin.

B. La proportionnalité de la sanction attachée au mandat de trois ans

La décision fixe la durée de l’inéligibilité à trois ans à compter de son prononcé pour sanctionner la violation des règles impératives de l’ordre public électoral. Le Conseil constitutionnel exerce un pouvoir de sanction proportionné à l’omission constatée afin de prévenir toute réitération de comportements contraires à la probité de la vie publique. Cette mesure prive l’intéressé du droit de se présenter à tout mandat électoral sur l’ensemble du territoire national pour la période définie par la haute juridiction. La publication de la solution au Journal officiel assure l’efficacité de la sanction tout en rappelant l’exigence de rigueur imposée à chaque candidat pour l’avenir législatif.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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