Conseil constitutionnel, Décision n° 2024-42/43/44/45/46/47/48/49/50/51/52/53 ELEC du 26 juin 2024

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 26 juin 2024, une décision rejetant les recours formés contre le décret convoquant les électeurs aux élections législatives. Le Président de la République a dissous l’Assemblée nationale le 9 juin 2024, imposant l’organisation d’un nouveau scrutin dans des délais particulièrement brefs. Plusieurs citoyens ont contesté la légalité de ce décret, invoquant notamment la violation des délais d’inscription sur les listes électorales et de candidature. Les requérants soutenaient que l’accélération du calendrier électoral portait atteinte au principe d’égalité devant le suffrage et à la sincérité des opérations de vote. La question posée aux juges consistait à déterminer si les impératifs constitutionnels de la dissolution permettent de déroger aux règles de forme du code électoral. Le juge a affirmé la primauté de l’article 12 de la Constitution, validant ainsi les modalités temporelles fixées par le pouvoir réglementaire pour ces élections. L’analyse de cette décision suppose d’étudier la supériorité des délais constitutionnels sur les normes législatives électorales, avant d’aborder la conciliation des principes fondamentaux par le juge.

I. La supériorité des délais constitutionnels sur les normes législatives électorales

La prééminence de l’article 12 de la Constitution sur les délais légaux

Le juge constitutionnel souligne que les dispositions de l’article 12 de la Constitution fixent impérativement le délai dans lequel doivent se tenir les élections législatives. Ces règles constitutionnelles « prévalent nécessairement sur ces dispositions législatives » relatives aux commissions de contrôle et aux délais de dépôt des déclarations de candidatures. Le Conseil consacre ainsi une hiérarchie où l’urgence de la procédure de dissolution écarte l’application rigide des délais ordinaires prévus par le législateur. Cette interprétation permet de garantir la continuité du fonctionnement des pouvoirs publics malgré la brièveté du temps imparti pour organiser la consultation nationale.

La neutralisation des procédures ordinaires de contrôle et de candidature

L’article L. 157 du code électoral impose normalement un dépôt des candidatures au plus tard le quatrième vendredi précédant le jour du scrutin contesté. Le Conseil décide cependant que les exigences de l’article 12 de la Constitution priment sur ces délais législatifs pour assurer la tenue effective du vote. Les juges considèrent que le respect scrupuleux du code électoral rendrait impossible l’organisation des élections dans les délais constitutionnels de vingt à quarante jours. Cette solution neutralise les griefs relatifs à l’impossibilité pour les commissions de contrôle de se réunir utilement avant la tenue du premier tour.

La primauté des délais constitutionnels ayant été établie, il convient d’apprécier la manière dont le Conseil préserve l’équilibre des principes électoraux fondamentaux.

II. La conciliation entre célérité du scrutin et respect des principes fondamentaux

La validation des différences de traitement fondées sur la situation géographique

Les requérants invoquaient une rupture d’égalité car les candidats situés sur le continent américain disposaient d’un temps de campagne réduit par rapport à la métropole. Le Conseil estime que « la différence de traitement entre les candidats est en outre en rapport direct avec l’objet des dispositions contestées ». La situation géographique spécifique et le décalage horaire justifient des modalités d’organisation dérogatoires afin d’assurer le bon déroulement du scrutin dans ces circonscriptions. Cette approche pragmatique permet de concilier le principe d’égalité devant la loi avec les nécessités logistiques imposées par l’éloignement des territoires d’outre-mer.

La sauvegarde de la sincérité du scrutin dans le cadre d’élections anticipées

En fixant un intervalle d’une semaine entre les deux tours, le décret n’entache pas la sincérité du scrutin malgré les dérogations au code électoral. Le Conseil juge que ces dispositions « mettent en œuvre, sans les méconnaître, les dispositions de l’article 12 de la Constitution » et préservent l’expression du suffrage. La brièveté de la campagne ne constitue pas, selon la juridiction, un obstacle insurmontable à la libre information des électeurs et à la sincérité du vote. Cette décision confirme la spécificité du contentieux des élections législatives anticipées dont les modalités sont dictées par l’urgence du calendrier constitutionnel imposé par le pouvoir exécutif.

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Hassan KOHEN
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