Conseil constitutionnel, Décision n° 2024-6391 AN du 6 juin 2025

Le Conseil constitutionnel, par une décision rendue le 5 juin 2025, s’est prononcé sur les conséquences du défaut d’ouverture d’un compte bancaire par un mandataire financier. Cette affaire concerne un candidat aux élections législatives de juin et juillet 2024 dont le compte de campagne fut rejeté par l’autorité de contrôle. L’administration a fondé son rejet sur l’absence totale de compte bancaire dédié aux opérations électorales lors de la période de scrutin législatif. Saisie du litige, la juridiction constitutionnelle doit déterminer si une telle omission justifie légalement l’annulation du compte et le prononcé d’une inéligibilité. Le juge valide le rejet du compte et déclare le candidat inéligible pour une durée d’un an en raison de la gravité du manquement constaté. L’examen de la rigueur des obligations comptables précédera l’analyse de la sévérité de la sanction prononcée à l’encontre du candidat.

I. L’exigence impérative de transparence bancaire dans le financement électoral

A. L’obligation fondamentale d’ouverture d’un compte unique

L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier « d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières ». Cette règle constitue le pilier du contrôle exercé par l’autorité de contrôle sur la réalité et la licéité des dépenses engagées durant la période électorale. Le législateur exige que l’intitulé du compte précise que le titulaire agit en qualité de mandataire financier d’un candidat nommément désigné. Cette traçabilité permet de distinguer les fonds personnels de ceux spécifiquement destinés à la conquête des suffrages lors d’un scrutin législatif. L’absence d’instrument de paiement dédié prive l’administration de tout moyen de vérification efficace sur les flux financiers internes à la campagne électorale.

B. Le rejet automatique du compte pour absence d’instrument bancaire

Le Conseil constitutionnel relève que le mandataire « n’avait pas ouvert de compte bancaire, en violation des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 ». Cette omission matérielle conduit inévitablement au rejet du compte de campagne car elle empêche toute mise en état d’examen par les services compétents. Le juge constitutionnel affirme que « cette circonstance est établie » et valide ainsi la position stricte adoptée précédemment par l’autorité administrative de contrôle. La décision souligne qu’une telle méconnaissance des règles de financement ne peut être régularisée a posteriori par la simple présentation de factures éparses. La transparence financière repose sur l’existence préalable d’un instrument bancaire unique capable de centraliser chaque recette et chaque dépense effectuée.

II. La qualification de la faute et le prononcé de l’inéligibilité

A. La caractérisation d’un manquement d’une particulière gravité

Selon l’article L.O. 136-1 du code électoral, le juge peut prononcer l’inéligibilité en cas de « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement ». Le Conseil constitutionnel estime que le défaut d’ouverture de compte bancaire relève de cette catégorie de fautes graves inhérentes au processus électoral. Il s’agit d’une règle fondamentale dont le candidat « ne pouvait ignorer la portée » compte tenu de la clarté des dispositions législatives en vigueur. La juridiction écarte toute possibilité d’erreur involontaire pour sanctionner une défaillance qui altère profondément la sincérité du contrôle financier. La particulière gravité est donc ici déduite de la nature même de l’obligation enfreinte par le candidat lors de sa campagne électorale.

B. La proportionnalité de la sanction d’inéligibilité d’un an

Le Conseil constitutionnel décide de prononcer l’inéligibilité du candidat « à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision ». Cette sanction proportionnée vise à protéger l’intégrité des futurs scrutins en écartant les individus ayant gravement méconnu les règles de transparence publique. La durée d’un an reflète la volonté du juge de sanctionner fermement une pratique empêchant la vérification de l’équilibre financier du compte. Cette mesure assure également l’égalité entre les candidats qui se soumettent scrupuleusement aux contraintes comptables imposées par le code électoral. La décision finale garantit ainsi que le respect des procédures de financement demeure une condition nécessaire à l’exercice de la vie démocratique.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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