Conseil constitutionnel, Décision n° 2024-6410 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 19 juin 2025, une décision relative au contentieux du financement des élections législatives organisées en juin et juillet 2024. Un candidat ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés n’a pas déposé son compte de campagne dans le délai légal de dix semaines. La Commission nationale des comptes de campagne a saisi le juge constitutionnel afin de statuer sur l’éventuelle inéligibilité du candidat pour ce manquement. L’intéressé fait valoir que le compte ouvert par son mandataire financier n’a enregistré aucune opération comptable réelle durant toute la période électorale. La question posée au juge est de savoir si le défaut de dépôt d’un compte inactif constitue un manquement d’une particulière gravité justifiant l’inéligibilité. Le Conseil constitutionnel décide qu’il n’y a pas lieu de prononcer l’inéligibilité, le manquement constaté ne revêtant pas un caractère de gravité suffisante. L’analyse de cette décision suppose d’examiner la nature du manquement aux obligations de transparence avant d’étudier la portée de l’appréciation souveraine exercée par le juge.

I. La caractérisation d’un manquement aux obligations de transparence financière

A. L’exigence légale d’établissement d’un compte de campagne Le code électoral impose à tout candidat franchissant le seuil de 1 % des suffrages exprimés d’établir un compte de campagne sincère et équilibré. Ce document doit retracer « l’ensemble des recettes perçues et l’ensemble des dépenses engagées » afin de permettre un contrôle rigoureux du plafonnement des dépenses électorales. L’obligation de dépôt constitue une formalité substantielle destinée à prévenir toute tentative de financement occulte ou disproportionné par rapport aux limites fixées par la loi.

B. La constatation du défaut de dépôt dans les délais Le juge constitutionnel relève que le candidat n’a pas déposé son compte de campagne avant l’expiration du délai fixé au dixième vendredi suivant le scrutin. Ce manquement formel place initialement l’intéressé sous le coup des sanctions prévues par l’article L.O. 136-1 du code électoral relatif à l’inéligibilité parlementaire. La reconnaissance d’une infraction formelle aux règles électorales ne saurait toutefois suffire à justifier automatiquement l’éviction définitive d’un candidat de la vie politique nationale.

II. L’appréciation proportionnée de la sanction d’inéligibilité par le juge

A. Le critère de la particulière gravité du manquement constaté Le Conseil constitutionnel rappelle que l’inéligibilité ne peut être prononcée qu’en présence d’une « volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité ». Cette disposition organique confère au juge un large pouvoir d’appréciation pour adapter la sanction à la réalité matérielle des faits reprochés au candidat. L’absence d’intention frauduleuse ou de préjudice grave à l’égalité entre les candidats conduit souvent la juridiction à une certaine clémence vis-à-vis des omissions administratives.

B. L’absence d’activité financière comme motif d’exonération En l’espèce, les pièces produites démontrent que le compte de dépôt ouvert par le mandataire n’a connu « aucun mouvement en dehors des dépenses de la campagne officielle ». Le manquement commis par le candidat perd alors son caractère de gravité puisqu’il ne dissimule aucune opération financière suspecte ni aucune recette non déclarée. Par conséquent, le Conseil constitutionnel estime que le défaut de dépôt ne justifie pas l’application de la sanction d’inéligibilité prévue par le code électoral.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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