Conseil constitutionnel, Décision n° 2024-6411 AN du 6 juin 2025

Le Conseil constitutionnel, par sa décision n° 2024-6411 AN du 5 juin 2025, se prononce sur le respect des obligations comptables lors des élections législatives. Un candidat ayant recueilli plus de un pour cent des suffrages exprimés n’a pas déposé son compte de campagne dans le délai légal imparti. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le juge constitutionnel afin de statuer sur cette omission caractérisée. Le candidat concerné n’a produit aucune observation pour justifier le manquement constaté par l’instance de contrôle des comptes de la campagne électorale. Le juge doit déterminer si l’absence totale de dépôt du compte constitue un manquement d’une particulière gravité justifiant une déclaration d’inéligibilité immédiate. Le Conseil constitutionnel retient la gravité du manquement et prononce une inéligibilité de trois ans, soulignant ainsi la rigueur nécessaire du financement électoral.

I. La rigueur des obligations comptables imposées aux candidats législatifs

A. Le cadre impératif du dépôt des comptes de campagne

L’article L. 52-12 du code électoral impose à tout candidat ayant obtenu au moins un pour cent des suffrages l’établissement d’un compte de campagne. Ce document doit retracer « l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection ». La loi assure ainsi une égalité de traitement entre les prétendants au suffrage universel en soumettant leurs ressources à un contrôle administratif rigoureux. Cette formalité comptable constitue une condition essentielle de la régularité du scrutin car elle prévient les abus de financement par des personnes privées.

B. La caractérisation objective du manquement du candidat

Le juge relève que le candidat n’a pas déposé son compte « alors qu’il y était tenu » après l’expiration du délai légal de dépôt. La preuve du manquement résulte simplement de l’absence du document auprès de la Commission nationale des comptes de campagne au terme de la procédure. Le Conseil constitutionnel exerce un contrôle objectif sur le respect des délais prescrits par les dispositions impératives du code électoral français en vigueur. Cette méconnaissance des règles de financement entraîne nécessairement des conséquences juridiques sévères pour le candidat ayant ignoré ses obligations fondamentales de transparence.

II. L’inéligibilité comme sanction nécessaire de l’opacité financière

A. L’appréciation souveraine de la gravité de l’omission

Selon l’article L.O. 136-1 du code électoral, le juge peut déclarer inéligible le candidat en cas de « manquement d’une particulière gravité » aux règles. Le défaut total de dépôt du compte de campagne est systématiquement considéré comme une faute lourde altérant la sincérité du contrôle des fonds. Il ne résulte pas de l’instruction que des « circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance » des obligations résultant de la loi. L’absence de justification ou de force majeure conduit le juge à sanctionner durement l’inertie du candidat face aux exigences de la démocratie représentative.

B. La portée de la sanction d’inéligibilité triennale

Le Conseil constitutionnel décide de prononcer l’inéligibilité du candidat « à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision ». La durée de la sanction reflète la volonté du juge de protéger l’ordre public électoral contre les pratiques opaques ou négligentes des acteurs politiques. Cette décision confirme une jurisprudence constante où l’absence de coopération avec l’autorité de contrôle est lourdement sanctionnée par la privation du droit d’éligibilité. Le juge constitutionnel assure ainsi l’efficacité des règles de financement en écartant durablement de la vie publique les candidats refusant de rendre leurs comptes.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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