Conseil constitutionnel, Décision n° 2024-6411 AN du 6 juin 2025

Le Conseil constitutionnel, par une décision du 6 juin 2025, a statué sur la régularité du financement d’une campagne lors des élections législatives. Un candidat ayant obtenu plus de un pour cent des suffrages exprimés dans une circonscription territoriale n’a pas déposé son compte de campagne. L’autorité administrative de contrôle a saisi le juge constitutionnel le 2 décembre 2024 après avoir constaté cette carence administrative majeure. Le candidat n’a produit aucune observation suite à la communication de cette saisine pour expliquer le défaut de transmission de ses documents. La question de droit posée est de savoir si l’absence totale de dépôt de compte constitue un manquement justifiant l’inéligibilité. Le Conseil constate le manquement et déclare le candidat inéligible pour une durée de trois ans en raison de la gravité des faits. L’étude de cette décision impose d’analyser l’obligation comptable impérative avant d’examiner la sanction d’un manquement d’une particulière gravité.

I. L’affirmation d’une obligation comptable impérative

A. Le non-respect des délais légaux de dépôt L’article L. 52-12 du code électoral impose une discipline budgétaire stricte aux candidats ayant franchi le seuil des un pour cent des suffrages. Ces derniers doivent déposer leur compte de campagne avant le dixième vendredi suivant le scrutin pour permettre un contrôle effectif du financement. En l’espèce, le candidat concerné s’est soustrait à cette obligation malgré le franchissement du seuil légal d’audience électorale lors du premier tour. La juridiction souligne que le compte doit retracer l’ensemble des recettes perçues et des dépenses engagées pour garantir la transparence de la vie politique. Ce dépôt constitue une formalité substantielle dont l’omission compromet la vérification de la régularité des opérations financières menées durant la période électorale.

B. L’absence de circonstances justificatives Le Conseil constitutionnel vérifie si des circonstances exceptionnelles peuvent expliquer ou atténuer le défaut de production des documents comptables requis par le législateur. L’instruction démontre que le candidat n’a produit aucune observation pour justifier son inertie face aux demandes répétées de l’organe de régulation. Les juges relèvent qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations » légales. Cette absence de justification renforce le caractère délibéré de l’omission, empêchant toute mansuétude de la part de la haute juridiction constitutionnelle. Le comportement du candidat permet alors de mesurer l’ampleur du manquement avant d’en tirer les conséquences juridiques nécessaires sur son éligibilité future.

II. La sanction d’un manquement d’une particulière gravité

A. La qualification juridique de la faute L’article L.O. 136-1 du code électoral permet au juge de prononcer l’inéligibilité en cas de volonté de fraude ou de manquement grave. Le défaut total de dépôt du compte de campagne est analysé comme une faute majeure portant atteinte à l’ordre public électoral français. Le Conseil constitutionnel affirme que « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement », la sanction devient inévitable pour préserver l’intégrité du scrutin. Cette qualification repose sur l’importance de la transparence financière qui interdit aux candidats de dissimuler l’origine et l’usage de leurs fonds. Le juge exerce ainsi une mission de gardien de l’équité démocratique en sanctionnant l’opacité budgétaire volontaire ou caractérisée du candidat.

B. La détermination de la durée d’inéligibilité La sanction prononcée consiste en une inéligibilité à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la date de la décision. Le Conseil fait une application rigoureuse des dispositions organiques pour assurer une réponse proportionnée à l’absence totale de coopération du candidat évincé. Cette durée de trois ans marque la volonté de la juridiction de dissuader toute légèreté dans la gestion administrative des futures campagnes électorales. La décision est publiée au Journal officiel pour assurer une publicité immédiate et garantir l’efficacité de l’interdiction de se présenter aux suffrages. La sévérité jurisprudentielle rappelle que le droit électoral subordonne la liberté de candidature au respect scrupuleux des règles de financement public.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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