Le Conseil constitutionnel, par une décision rendue le 6 juin 2025, a statué sur la régularité du financement de la campagne d’un candidat aux élections législatives. L’intéressé, ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés, était tenu de déposer un compte de campagne certifié auprès de l’autorité de contrôle des financements politiques. Cette autorité a saisi le juge le 5 décembre 2024 après avoir constaté que le compte de campagne avait été déposé avec onze jours de retard calendaire. Par ailleurs, le dossier ne comportait aucune présentation par un expert-comptable alors que les dépenses engagées excédaient le plafond réglementaire fixé à 4 000 euros. La question de droit posée à la haute juridiction concerne la qualification juridique de ces manquements cumulés au regard de l’exigence de transparence du financement électoral. Le juge électoral décide de déclarer le candidat inéligible pour une durée de trois ans en raison du « cumul et au caractère substantiel des obligations méconnues ». L’analyse de cette décision conduit à étudier la caractérisation de manquements substantiels aux obligations comptables avant d’apprécier la rigueur de la sanction face aux irrégularités constatées.
I. La caractérisation de manquements substantiels aux obligations comptables Le législateur a instauré un cadre temporel et formel strict pour garantir la sincérité des scrutins et le contrôle efficace des dépenses des candidats aux élections.
A. Le non-respect du délai légal de dépôt du compte de campagne L’article L. 52-12 dispose que le compte doit être déposé « au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin ». En l’espèce, le candidat a transmis ses pièces le 17 septembre 2024, soit après l’expiration du délai impératif fixé au 6 septembre de la même année. Le juge électoral considère que le respect des délais de dépôt est une condition substantielle de l’examen des comptes par l’autorité administrative de contrôle financier.
B. Le défaut de recours obligatoire à un professionnel de l’expertise comptable Le code électoral impose que le compte soit « présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables » lorsque les dépenses dépassent le montant fixé par décret. Le candidat a méconnu cette obligation alors que son compte affichait des flux financiers supérieurs au seuil de 4 000 euros prévu par le code électoral. Cette absence de certification empêche la vérification de la présence des pièces justificatives requises et compromet gravement la sincérité du compte de campagne soumis au juge. Le constat de ces irrégularités formelles et matérielles permet désormais d’apprécier la réponse juridique apportée par le juge constitutionnel pour sanctionner de tels comportements négligents.
II. La rigueur de la sanction face au cumul des irrégularités La sévérité du juge constitutionnel s’explique par la nécessité de protéger l’ordre public électoral contre les dérives liées au financement occulte des activités politiques nationales.
A. L’appréciation de la particulière gravité des manquements constatés Selon l’article L.O. 136-1, l’inéligibilité peut être prononcée en cas de « volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement ». La haute juridiction n’exige pas la preuve d’une intention frauduleuse dès lors que le cumul des omissions témoigne d’une méconnaissance grave des règles de probité. La réunion du retard de dépôt et du défaut d’expertise comptable constitue une faute que des circonstances particulières ne sauraient justifier selon l’instruction du dossier.
B. La portée de l’inéligibilité prononcée par le juge constitutionnel Le Conseil constitutionnel déclare l’intéressé inéligible pour une durée de trois ans, marquant ainsi une volonté de dissuasion forte envers les futurs acteurs de la vie politique. Cette décision rappelle que la transparence financière est un pilier de la démocratie représentative dont le respect scrupuleux conditionne la validité des candidatures aux fonctions électives. L’inéligibilité immédiate assure que les règles relatives au plafonnement des dépenses électorales ne restent pas de simples recommandations dépourvues de toute effectivité juridique réelle et concrète.