Par une décision du 20 juin 2025, n° 2024-6417 AN, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur le non-respect des obligations de financement électoral lors des élections législatives. Un candidat ayant obtenu plus de un pour cent des suffrages exprimés n’a déposé aucun compte de campagne dans les délais légaux prescrits. L’autorité nationale de contrôle a saisi le juge électoral le 18 décembre 2024 conformément aux dispositions spécifiques du code électoral. L’intéressé n’a produit aucune observation pour justifier ce manquement malgré la communication de la saisine effectuée par les services de la juridiction. La question posée au juge constitutionnel est de savoir si l’absence de dépôt du compte de campagne constitue un manquement d’une particulière gravité. Le Conseil constitutionnel décide que ce défaut de dépôt justifie une déclaration d’inéligibilité pour une durée de trois ans à compter de sa décision. L’étude de cette solution conduit à analyser l’impératif du dépôt du compte avant d’envisager la sévérité de la sanction prononcée par les juges.
I. L’impératif légal du dépôt du compte de campagne
A. Les critères de l’obligation comptable électorale L’article L. 52-12 du code électoral impose à certains candidats l’établissement d’un compte retraçant l’ensemble des recettes perçues et des dépenses engagées. Cette obligation concerne spécifiquement les candidats ayant obtenu au moins un pour cent des suffrages exprimés ou ayant bénéficié de dons de personnes physiques. Le législateur souhaite garantir la transparence financière des scrutins en contrôlant l’origine et la nature des fonds utilisés par les acteurs de la vie politique. Le juge rappelle que ce compte « doit être en équilibre ou excédentaire » afin d’éviter tout endettement excessif lié à la conquête des mandats électifs.
B. La caractérisation du défaut de dépôt Le dépôt doit intervenir au plus tard le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin devant la commission nationale compétente pour le contrôle financier. Dans cette affaire, le candidat n’a pas transmis ses documents comptables à l’expiration du délai légal malgré son score supérieur au seuil de un pour cent. L’absence totale de transmission constitue une violation directe des prescriptions législatives encadrant le financement des campagnes électorales pour le renouvellement de l’Assemblée nationale. Le Conseil constitutionnel relève qu’aucune circonstance particulière n’est de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant des dispositions du code électoral susmentionnées.
II. La sanction d’inéligibilité pour manquement grave
A. La notion de manquement d’une particulière gravité L’article L.O. 136-1 permet au juge constitutionnel de déclarer inéligible le candidat qui n’a pas respecté les conditions et les délais de dépôt légaux. Cette mesure de police électorale suppose l’existence d’une volonté de fraude ou d’un « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales ». Le défaut de dépôt d’un compte de campagne est traditionnellement considéré par la jurisprudence comme une méconnaissance grave des principes de transparence et d’équité. Les juges estiment ici que la carence totale de l’intéressé prive l’administration de toute possibilité de contrôle sur la régularité des opérations financières engagées.
B. La portée de la déclaration d’inéligibilité Le Conseil constitutionnel prononce une inéligibilité à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la date de publication de sa décision. Cette sanction prive le citoyen du droit de se porter candidat lors des futurs scrutins organisés sur l’ensemble du territoire de la République française. La durée retenue témoigne de la volonté du juge de réprimer fermement les comportements qui entravent le bon fonctionnement du contrôle des comptes de campagne. Cette solution s’inscrit dans une ligne jurisprudentielle constante visant à assurer la sincérité des résultats électoraux par le respect strict des obligations financières.