Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-1128 QPC du 21 mars 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu le 21 mars 2025 une décision portant sur la conformité du code monétaire et financier aux droits et libertés garantis par la Constitution. Cette affaire concerne les pouvoirs d’enquête d’une autorité de régulation lors de visites domiciliaires autorisées par un juge des libertés et de la détention. Une association a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité transmise par une décision du Conseil d’État rendue le 27 décembre 2024. La requérante soutient que l’absence de notification du droit de se taire lors du recueil d’explications sur place méconnaît les exigences de la Déclaration de 1789. Le litige porte sur l’obligation d’informer les personnes sollicitées de leur faculté de ne pas contribuer à leur propre incrimination pénale ou administrative.

Le juge constitutionnel devait décider si l’absence d’avertissement préalable sur le droit au silence lors d’une saisie porte atteinte au principe de présomption d’innocence. Les sages ont déclaré la disposition conforme en précisant que ces déclarations ne visent pas à interroger une personne sur des faits qui lui sont reprochés. Cette solution repose sur une distinction entre la recherche technique de preuves matérielles et l’interrogatoire formel mené ultérieurement lors d’une procédure de sanction. L’analyse de cette décision commande d’étudier l’écartement de l’obligation de notification avant d’envisager la protection maintenue par le contrôle effectif de la loyauté.

I. L’exclusion de l’obligation de notification du droit au silence

Le Conseil constitutionnel écarte l’exigence d’une information préalable sur le droit de se taire lors des opérations de visites et de saisies domiciliaires. Cette position s’appuie sur la nature spécifique de cette phase d’enquête dont l’unique objet reste la recherche d’éléments matériels de preuve.

A. Le fondement constitutionnel du droit de ne pas s’auto-incriminer

L’article 9 de la Déclaration de 1789 protège la présomption d’innocence dont découle directement le principe fondamental selon lequel « nul n’est tenu de s’accuser ». Ce droit au silence s’impose pour toute sanction ayant le caractère d’une punition, incluant ainsi les amendes administratives prononcées par le régulateur financier. Les garanties constitutionnelles protègent les citoyens contre toute contrainte visant à obtenir des aveux ou des déclarations préjudiciables lors des contrôles administratifs intrusifs.

B. L’absence d’information lors de la collecte d’explications sur place

Le juge constitutionnel estime que les dispositions critiquées « n’impliquent pas que la personne sollicitée se voie notifier son droit de se taire » durant l’intervention. Cette dispense d’avertissement se justifie car la visite domiciliaire vise seulement à découvrir des documents ou des supports informatiques utiles à la manifestation de la vérité. La collecte de propos spontanés ou de précisions techniques par les agents habilités ne constitue pas juridiquement un acte d’accusation formel nécessitant une protection renforcée.

L’absence d’avertissement formel ne laisse pas la personne sans défense grâce aux limites imposées à l’usage des propos recueillis durant la procédure.

II. Une conciliation entre l’efficacité de l’enquête et la loyauté procédurale

La décision assure la validité des pouvoirs d’investigation tout en rappelant le rôle essentiel de l’autorité judiciaire dans le contrôle de la régularité des opérations. Cette approche préserve les capacités d’action du régulateur sans pour autant sacrifier les garanties fondamentales des personnes présentes lors des saisies.

A. La destination limitée des explications recueillies par les enquêteurs

Les sages précisent que ces dispositions « n’ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet » de recueillir des déclarations sur des faits reprochés. Le recueil d’explications doit rester purement fonctionnel et se limiter aux nécessités techniques de la visite ou à l’identification des pièces saisies par les agents. Si les enquêteurs utilisaient cette faculté pour mener un véritable interrogatoire de fond, ils détourneraient la procédure de sa finalité initiale définie par le législateur.

B. Le contrôle judiciaire de la loyauté des investigations menées

Le Conseil constitutionnel rappelle qu’il appartient au juge compétent de s’assurer que le recueil des explications respecte scrupuleusement le principe de « loyauté de l’enquête ». Le juge des libertés et de la détention exerce une surveillance constante sur le déroulement des visites pour prévenir tout abus de pouvoir des autorités. Cette vigilance juridictionnelle garantit que les propos collectés ne résultent d’aucune pression indue exercée sur les individus durant le temps de l’occupation des locaux.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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