Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6429 AN du 6 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 5 juin 2025, la décision n° 2025-6429 AN concernant le contentieux électoral d’une circonscription législative nationale. Cette instance traite de la sanction attachée au défaut de dépôt du compte de campagne par un candidat aux élections législatives.

À la suite du scrutin de l’été 2024, l’intéressée n’a pas transmis son compte de campagne à l’autorité de régulation dans les délais légaux impartis. L’autorité de contrôle a donc saisi le juge constitutionnel le 3 janvier 2025 afin qu’il statue sur les conséquences juridiques de cette omission. La candidate invoquait des difficultés techniques pour l’ouverture d’un compte bancaire spécifique pour justifier le non-respect des prescriptions législatives du code électoral.

Le juge électoral devait déterminer si le défaut total de dépôt du compte de campagne constitue un manquement d’une particulière gravité justifiant l’inéligibilité.

Le Conseil constitutionnel rejette l’argumentation de la requérante et prononce une inéligibilité de trois ans en raison de la méconnaissance des obligations légales. L’étude de l’affirmation de l’obligation de dépôt (I) précèdera celle de la mise en œuvre de la sanction d’inéligibilité (II).

I. L’affirmation de l’obligation de dépôt des comptes de campagne

A. La force contraignante du délai de dépôt légal

L’article L. 52-12 du code électoral impose une obligation stricte de transparence financière à tout candidat ayant obtenu au moins un pour cent des voix. Le législateur exige que ce document retrace « selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées ». Ce formalisme garantit l’égalité entre les prétendants et permet un contrôle efficace de l’origine des fonds utilisés durant la période électorale. Le compte doit impérativement être déposé « au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin » auprès de l’institution.

B. L’inefficacité des excuses liées aux obstacles bancaires

La candidate tentait de s’exonérer de sa responsabilité en mettant en avant les obstacles rencontrés lors des démarches d’ouverture d’un compte bancaire. L’obligation de dépôt se heurte parfois à des réalités matérielles dont la pertinence juridique doit être rigoureusement évaluée par la haute juridiction. Le Conseil constitutionnel écarte ce moyen en soulignant qu’aucune « circonstance particulière » n’était de nature à justifier la méconnaissance des obligations légales. Les juges considèrent que les difficultés administratives ne sauraient dispenser un candidat de l’établissement d’un état sincère de ses dépenses électorales.

II. La mise en œuvre rigoureuse de la sanction d’inéligibilité

A. La caractérisation d’un manquement d’une particulière gravité

L’article L.O. 136-1 prévoit que le juge peut déclarer inéligible le candidat qui n’a pas déposé son compte dans les conditions prescrites. Cette sanction nécessite toutefois la constatation d’une « volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales ». En l’espèce, l’absence totale de transmission des documents comptables est analysée comme une faute majeure portant atteinte à la clarté du scrutin. La juridiction refuse de faire preuve d’indulgence face à une omission qui empêche toute vérification de la légalité des fonds collectés par la candidate.

B. La détermination souveraine de la durée de l’inéligibilité

La reconnaissance de la gravité du manquement conduit logiquement le juge à fixer une période d’interdiction d’exercice des mandats électifs. Le Conseil constitutionnel prononce en conséquence l’inéligibilité de la candidate « à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision ». Cette durée s’inscrit dans la fourchette haute des sanctions prévues par le code électoral afin de marquer la désapprobation du juge. Cette fermeté jurisprudentielle rappelle que le respect des règles de financement constitue une condition indispensable de la probité de la vie politique française.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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