Le Conseil constitutionnel, par une décision du 6 juin 2025, s’est prononcé sur le non-respect des obligations de financement électoral lors des élections législatives de juin 2024. Une candidate ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés n’a pas déposé son compte de campagne dans les délais légaux prescrits par le code électoral.
La requérante justifie cette omission par des difficultés bancaires rencontrées durant la période électorale, sans toutefois apporter de preuves suffisantes pour dégager sa responsabilité juridique. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le juge constitutionnel le 3 janvier 2025 après avoir constaté l’absence de dépôt.
La question posée résidait dans l’appréciation de la gravité du manquement afin de déterminer si une sanction d’inéligibilité devait être prononcée contre la candidate défaillante. Le Conseil déclare l’intéressée inéligible pour trois ans, estimant que l’absence de compte constitue un manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. L’étude de la rigueur des obligations comptables imposées aux candidats (I) précédera l’analyse de la sévérité de la sanction retenue par le juge électoral (II).
I. La rigueur des obligations comptables incombant aux candidats aux élections législatives
A. Le caractère impératif du dépôt du compte de campagne
Le code électoral impose à tout candidat ayant obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés d’établir un compte de campagne complet et équilibré. Ce document doit retracer, « selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection ». Le dépôt doit impérativement intervenir avant le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, assurant ainsi la transparence indispensable au bon fonctionnement de la démocratie.
B. L’insuffisance des justifications liées aux difficultés matérielles
La candidate invoquait des obstacles pratiques liés à l’ouverture d’un compte bancaire pour expliquer l’absence de transmission de ses documents comptables à l’autorité de contrôle. Cependant, le juge constitutionnel rejette cet argument en considérant qu’il ne résulte pas de l’instruction que cette circonstance puisse justifier la méconnaissance flagrante des obligations légales. L’absence totale de compte prive la commission de tout moyen de vérification, rendant inopérante toute excuse qui ne relèverait pas d’un cas de force majeure avéré. Cette intransigeance sur la forme des obligations comptables justifie alors l’application d’une sanction proportionnée à la nature du manquement constaté par la juridiction.
II. La sévérité de la sanction garantissant la transparence du financement électoral
A. La caractérisation d’un manquement d’une particulière gravité
L’article L.O. 136-1 permet de sanctionner une « volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité » aux règles de financement par une mesure d’inéligibilité. Le Conseil estime que le défaut de dépôt par un candidat tenu à cette obligation légale revêt intrinsèquement un caractère de gravité justifiant une sanction exemplaire. En l’espèce, le refus de se soumettre au contrôle administratif est analysé comme une atteinte directe à l’égalité entre les candidats et à la sincérité du scrutin.
B. La portée temporelle de l’inéligibilité prononcée par le juge
Le juge électoral énonce que « l’intéressée est déclarée inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans ». Cette durée significative est destinée à écarter temporairement de la vie publique les citoyens négligeant les principes fondamentaux régissant les dépenses liées aux scrutins. Cette décision sera publiée au Journal officiel, soulignant la volonté du Conseil de maintenir une discipline stricte autour des flux financiers des compétitions politiques nationales.