Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6432 AN du 6 juin 2025

Le Conseil constitutionnel, par une décision du 5 juin 2025, s’est prononcé sur le respect des obligations de financement des campagnes électorales lors des élections législatives. Un candidat ayant concouru dans la cinquième circonscription de Paris a omis de déposer son compte de campagne dans les délais légaux prescrits. Bien qu’il ait obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés, l’intéressé n’avait pas restitué les carnets de reçus-dons initialement délivrés à son mandataire. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le juge électoral le 13 janvier 2025 pour constater ce manquement.

La question posée au Conseil constitutionnel portait sur l’obligation de dépôt d’un compte de campagne en présence de carnets de reçus-dons non restitués à l’administration. Le juge devait déterminer si la simple détention de ces documents comptables suffisait à imposer l’établissement d’un compte de campagne au candidat. Le Conseil constitutionnel affirme que le défaut de restitution fait présumer la perception de dons, ce qui rend obligatoire le dépôt d’un compte de campagne. L’étude de cette décision nécessite d’analyser la présomption de réception de dons avant d’examiner la sanction d’inéligibilité prononcée par le juge électoral.

I. L’affirmation d’une présomption de réception de dons de personnes physiques

A. L’obligation comptable liée à la détention de carnets de reçus-dons

Le code électoral impose aux candidats ayant bénéficié de dons de personnes physiques d’établir un compte de campagne, quel que soit leur score électoral. Le Conseil rappelle que le compte « retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ». En l’espèce, le candidat n’avait pas déposé de compte alors qu’il détenait encore des carnets de reçus-dons délivrés par les services de la préfecture. Le juge considère que l’absence de restitution de ces documents empêche de regarder le candidat comme n’ayant pas bénéficié de dons privés durant la période électorale.

B. Une présomption réfragable faute de preuve contraire

Le Conseil constitutionnel précise que « l’absence de restitution par le candidat des carnets de reçus-dons fait présumer de la perception de dons de personnes physiques ». Cette présomption n’est toutefois pas absolue et peut être combattue par tous moyens par le candidat afin de démontrer l’absence de recettes. Dans cette affaire, le candidat n’a produit aucun justificatif de nature à renverser cette présomption malgré la communication de la saisine par le juge. Le manquement à l’obligation de dépôt est donc juridiquement constitué, ce qui entraîne nécessairement l’examen des conséquences de cette omission sur l’éligibilité de l’intéressé.

II. La sanction de la méconnaissance des obligations de financement électoral

A. L’absence de circonstances justificatives au manquement constaté

Le juge électoral examine systématiquement si des raisons particulières pourraient excuser ou atténuer la portée de la méconnaissance des règles relatives au financement des campagnes. Il relève qu’il « ne résulte pas de l’instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant de l’article L. 52-12 ». Le candidat n’a soumis aucune observation durant la procédure contentieuse pour expliquer son silence ou les difficultés éventuelles rencontrées lors de l’établissement de ses comptes. Le caractère injustifié de l’omission conduit le juge à apprécier la gravité de la faute commise au regard de la transparence financière nécessaire.

B. La sévérité de l’inéligibilité triennale pour manquement grave

Face au défaut de dépôt du compte de campagne, le Conseil constitutionnel dispose d’un pouvoir d’appréciation pour prononcer une peine d’inéligibilité à tout mandat. Le juge estime qu’en l’espèce, « compte tenu de la particulière gravité de ce manquement », il convient de sanctionner le candidat pour une durée de trois années. Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence rigoureuse visant à garantir que chaque participant aux élections législatives se soumette au contrôle de la commission nationale compétente. L’inéligibilité prend effet immédiatement à compter de la notification de la décision, marquant ainsi la fin de l’analyse juridique du comportement du candidat évincé.

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Hassan KOHEN
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