Le Conseil constitutionnel, par une décision du 5 juin 2025, se prononce sur le respect des obligations comptables imposées aux candidats aux élections législatives. Un candidat à l’élection législative des 30 juin et 7 juillet 2024 a omis d’ouvrir un compte bancaire spécifique pour sa campagne électorale. L’autorité chargée du contrôle des finances politiques a rejeté son compte de campagne par une décision du 13 janvier 2025. Cette autorité administrative a ensuite saisi le juge constitutionnel le 22 janvier suivant afin de statuer sur l’éligibilité de l’intéressé. Le litige porte sur l’absence totale de compte bancaire ouvert par le mandataire financier, en méconnaissance des prescriptions du code électoral. Le Conseil doit déterminer si l’omission d’une telle formalité constitue un manquement d’une particulière gravité justifiant une mesure d’inéligibilité. Les juges confirment le rejet du compte et prononcent une inéligibilité d’un an, soulignant la portée fondamentale de la règle méconnue. L’examen de cette décision commande d’analyser d’abord la caractérisation du manquement aux règles de financement (I) avant d’étudier la proportionnalité de la sanction (II).
I. La sanction justifiée d’un manquement substantiel aux règles de financement
A. L’obligation impérative de l’ouverture d’un compte bancaire unique
L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier l’ouverture d’un compte bancaire unique pour retracer la totalité des opérations financières. Cette exigence garantit la transparence du financement électoral et permet un contrôle efficace des recettes ainsi que des dépenses engagées. En l’espèce, le mandataire n’avait ouvert aucun compte, violant ainsi les dispositions essentielles du deuxième alinéa du texte précité. Le Conseil relève que cette circonstance est établie, privant ainsi la campagne de tout support comptable officiel et vérifiable.
B. Le rejet légitime du compte de campagne par l’autorité administrative
L’autorité de contrôle a rejeté le compte de campagne au motif de l’absence de ce compte bancaire pourtant obligatoire. Le juge constitutionnel précise qu’il résulte de l’article L. 52-12 que chaque candidat est tenu d’établir un compte de campagne rigoureux. Ce document doit retracer l’ensemble des recettes perçues et des dépenses effectuées en vue de l’élection sous le contrôle d’un expert-comptable. « C’est à bon droit que » l’autorité de contrôle précitée « a rejeté son compte de campagne ». Cette validation de la décision administrative souligne l’importance de la structure bancaire comme socle de la sincérité du scrutin. La constatation de cette irrégularité comptable permet alors au juge constitutionnel d’apprécier l’opportunité d’une sanction personnelle.
II. La rigueur de la sanction d’inéligibilité face à l’ignorance présumée du droit
A. La reconnaissance d’un manquement d’une particulière gravité
L’article L.O. 136-1 permet au Conseil de déclarer inéligible le candidat en cas de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement. Les juges apprécient ici la nature de l’omission pour déterminer si elle altère fondamentalement la transparence financière de la campagne. Le Conseil retient le grief « eu égard à la particulière gravité du manquement à une règle dont » le candidat « ne pouvait ignorer la portée ». L’absence de compte bancaire empêche toute traçabilité des flux financiers, ce qui constitue une violation majeure des obligations légales de probité.
B. L’exercice du pouvoir d’appréciation du juge constitutionnel
Le juge dispose d’un pouvoir souverain pour moduler la durée de l’inéligibilité en fonction de l’intentionnalité ou de la gravité des faits. Dans cette affaire, la juridiction prononce une interdiction de se présenter à tout mandat pour une durée d’une année. La sanction prend effet à compter de la date de la décision, marquant ainsi une volonté de réprimer fermement les négligences comptables. Cette fermeté rappelle que la connaissance des règles électorales s’impose à tout citoyen sollicitant le suffrage des électeurs.