Conseil constitutionnel, Décision n° 2025-6438 AN du 20 juin 2025

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 20 juin 2025, une décision relative au contrôle des comptes de campagne lors des élections législatives tenues en juin et juillet 2024. Un candidat s’est présenté dans la cinquième circonscription d’Indre-et-Loire sans toutefois respecter l’obligation de désigner un mandataire financier pour l’ouverture d’un compte bancaire unique. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté ce compte le 9 janvier 2025 pour violation manifeste des dispositions du code électoral. Saisi par cette autorité administrative, le juge électoral doit apprécier si l’absence de compte bancaire spécifique constitue un manquement justifiant l’inéligibilité du candidat n’ayant produit aucune observation. La question centrale porte sur la qualification juridique d’une telle omission au regard des exigences de transparence financière et de la sincérité du scrutin législatif concerné. Le Conseil constitutionnel confirme le rejet du compte et prononce une inéligibilité d’un an, soulignant la gravité particulière du mépris des règles de financement électoral. L’analyse de cette décision suppose d’étudier l’impératif de l’ouverture d’un compte bancaire unique avant d’envisager la rigueur de la sanction attachée à ce manquement structurel.

**I. L’impératif de l’ouverture d’un compte bancaire de campagne unique**

**A. Une obligation formelle au service de la traçabilité financière**

L’article L. 52-6 du code électoral « impose au mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières » durant la période électorale. Cette règle garantit une séparation étanche entre les ressources personnelles du candidat et les fonds collectés spécifiquement en vue de financer ses dépenses de communication électorale. La présence d’un compte unique permet d’identifier l’origine de chaque recette et la nature exacte des dépenses engagées pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale.

**B. Le fondement juridique du rejet pour absence de support bancaire**

Le juge relève que le compte a été écarté car le mandataire n’avait pas « ouvert de compte bancaire, en violation des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 ». L’existence physique d’un compte dédié demeure la condition sine qua non permettant à la commission nationale de vérifier l’équilibre et la provenance réelle des fonds engagés. Cette irrégularité substantielle affecte directement la validité de l’ensemble de la procédure de financement puisque le flux financier échappe par définition à tout contrôle bancaire indépendant. L’absence d’observations produites par l’intéressé durant l’instruction confirme la matérialité de cette faute et conduit logiquement le juge constitutionnel à confirmer la décision administrative initiale.

**II. La rigueur de la sanction attachée à la méconnaissance des règles de financement**

**A. La constatation d’un manquement d’une particulière gravité**

Selon l’article L.O. 136-1, l’inéligibilité peut être prononcée en cas de « manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales » par le candidat concerné. Le Conseil constitutionnel estime que l’absence totale de compte bancaire prive l’administration de tout moyen de contrôle sérieux sur la sincérité des dépenses engagées par le binôme. La jurisprudence constante qualifie cette omission de faute lourde car elle compromet l’objectif de transparence financière voulu par le législateur lors des réformes du code électoral.

**B. La proportionnalité d’une inéligibilité limitée à une année**

Le juge prononce une inéligibilité « pour une durée d’un an à compter de la présente décision » compte tenu d’un manquement dont l’auteur « ne pouvait ignorer la portée ». Cette solution classique réaffirme la volonté du législateur organique d’écarter de la vie publique les citoyens négligeant les obligations fondamentales garantissant l’équité des compétitions électorales. La sanction demeure mesurée au regard de l’obstination du candidat qui n’a pas cherché à justifier sa conduite devant les membres de la haute instance juridictionnelle française. L’inéligibilité ainsi prononcée assure une protection efficace du suffrage universel en prévenant le renouvellement de pratiques financières opaques lors des prochaines échéances électorales nationales.

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Hassan KOHEN
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